Objectif Cinéma
: L’écriture est extraordinaire,
emprunte de violence et de poésie, elle conduit vers
une sensation immédiate, vous pouvez nous en dire plus ?
Arnaud Michniak
: C’est énormément de torsion du noyau cérébral
pour employer une image. Les choses arrivent un peu par magie.
Je vais tomber sur des idées de textes qui vont me
paraître juste pour refléter des sentiments profonds,
intérieurs ou par rapport à ce qui m’entoure
ou par rapport à chacun dans sa vie et son lien au
monde et ces choses vont faire sens alors que d’autres partiront
en fumée.
C’est le point de départ
sur lequel je travaille : étoffer une idée
simple, comme sur le morceau Une vie, qui en est une
juste illustration : une idée très simple
rendue belle par l’envie de lui trouver un sens, un sens qui
frappe.
Soit ce sont des idées
plus libres, des associations auxquelles je reconstruis un
fil conducteur dans un travail plus littéraire.
Objectif Cinéma
: Dans cette écriture,
on retrouve la rage, la violence explosive de certains écrivains,
je pense à Louis Calaferte par exemple.
Arnaud Michniak :
Effectivement, Louis Calaferte, Hubert Selby, Mehdi Belhaj
Kacem plus récemment et d’autres… sont des écrivains
dont j’apprécie l’univers, le travail sur l’écriture.
Comme le disait Damien
pour la musique, mon intérêt s’oriente vers des
gens un peu à part, avec leur univers, des artistes
plutôt contre l’ordre établi, c’est ce qui prime
par delà la notoriété littéraire,
il faut qu’il y ait de la chair, un sentiment d’urgence.
Objectif Cinéma :
Au delà du côté immédiatement violent
et sans concession de votre musique, il existe une poétique
indéniable, peut-être plus background, est-ce
une volonté ?
Damien Bétous
: Exactement, notre principal sujet
de conversation reste centré sur le merdier ambiant
dans lequel on vit, et la réaction première
serait de prendre une batte de Base Ball et de tout casser :
nous affichons ce côté primitif, premier de réaction,
mais dessous, nous essayons de comprendre, d’avoir un regard
juste, sérieux et réfléchi, par delà
la puissance de destruction qui nous tient. Arnaud passe beaucoup
de temps sur les textes mais surtout à les finir.
Arnaud Michniak
: Outre le côté premier de la réaction,
du jet dans l’écriture, ils nous importe avant tout
d’apporter un sens, une vision globale, de sortir de cette
réalité tout en y restant, en apportant si possible
une certaine poésie à tout cela.
Damien Bétous
: Et la ville disparaît,
le dernier morceau de l’album, caractérise cette démarche.
C’est un morceau que nous avions à l’esprit depuis
longtemps mais étrangement, nous n’avions ni texte,
ni musique, comme s’il était en gestation.
Et lors de notre dernière
session d’enregistrement au fond d’un village de montagne,
quelques jours après les attentats de septembre, dans
une ambiance donc un peu spéciale, nous finissons l’album
avec ce morceau et là en allumant la télé,
le 21 septembre nous apprenons l’explosion de Toulouse, notre
ville. Loin de chez nous sans la possibilité de communiquer
avec nos proches.
Cette chanson n’avait à
l’origine aucun lien avec les événements, nous
avons d’ailleurs tout de suite arrêté de travailler
dessus.
Comme si nous étions
dépassés par les correspondances de ce monde
dans lequel on vit. Ce fût une période vraiment
étrange.
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