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ENTRETIEN


Objectif Cinéma
 : Qu’est-ce qui a vous poussé vers le cinéma ?

Jean Rollin : La première fois que je suis allé au cinéma, j’avais 8 ans, et ce fut à la campagne, où je vivais avec ma mère. C’était Capitaine Fracasse d’Abel Gance. C’était le premier film que je voyais, et je me suis alors dit " je veux faire ça quand je serais grand " ! (rires) En fait, deux séquences surtout m’avaient fortement impressionné : une séquence de tempête, et un duel dans un cimetière. Pour la petite histoire, sur mon premier film (1) Le Viol du Vampire, de manière tout à fait inconsciente, j’ai filmé la même chose que ce que j’avais vu enfant : un duel entre deux femmes à la lueur des torches. Plusieurs années plus tard, je me souvins du film de Gance, et je me suis dit alors dit à moi-même : " mais j’ai déjà fait ça " !


  Jean Rollin (c) D.R.

Objectif Cinéma : Les serials ont-ils eu une grande influence?

Jean Rollin : Oui. Les serials, la bande dessinée… Quand j’étais jeune, la télévision n’existait pas encore. Alors, avec mes camarades de classe, nous allions au cinéma au moins trois fois par semaine. J’habitais près de la gare Montparnasse, et à l’intérieur de la gare il y avait un petit cinéma ; c’était une chaîne présente dans toutes les gares parisiennes à l’époque, appelée le " Cinéac ". Les gens allaient dans ces cinémas, entre deux trains, etc…. C’était complètement surréaliste ! Quand vous étiez dans la salle, les gens entraient et sortaient sans arrêt, on entendait les annonces, " le train en provenance de… entre en gare… ". C’était vraiment curieux. Bien sûr, le public n’avait pas beaucoup de temps, aussi ces salles ne passaient que des films courts, et en particulier - c’était pour cela que mes amis et moi y allions - des " serials ". J’étais alors complètement fasciné par The Miracle rider, Mysterious Doctor Satan, Naoka the jungle girl 

Un des grand plus plaisirs de ma vie fut, il y a de cela 4 ou 5 ans, d’aller à New York et d’y trouver en vidéo les vieux serials " Republic " ; toutes mes économies y passèrent, mais je peux désormais les revoir chez moi, sur mon propre magnétoscope.

Le Viol Du Vampire est découpé comme un serial, en deux parties, avec beaucoup de " cliffhangers ", dans l’esprit de la " Republic ", qui provoquait un rebondissement toutes les 10 minutes, etc.

A cette même époque où je découvrais les serials, je lisais beaucoup de bandes dessinées. A cette époque, elles étaient incroyables ! Ghost Walk , etc ; depuis mes 10 ans, je les collectionne, et je n’en ai jamais perdu une seule.

Nos imaginations devaient trouver un terrain d’exercice ; et là tout était " à suivre " -" continued next week " : les mots magiques ! Nous passions alors nos semaines à inventer la suite, et notre imagination travaillait sans arrêt. Toutes ces choses, les serials, les bandes dessinées, étaient importantes car elles excitaient notre imagination, notre esprit. Maintenant, les enfants sont devant la télévision, et tout y est pré-digéré, ils n’ont aucun effort à fournir pour comprendre ce qu'ils voient. L’imagination n’est plus sollicitée.



House of Dracula (c) D.R.

Objectif Cinéma : En quoi le cinéma fantastique vous a-t-il influencé ? On pense parfois à Mario Bava dans vos films…

Jean Rollin : En ce qui concerne Bava, j’ai vu ses films, une fois adulte; je ne peux donc pas dire qu’ils m’ont véritablement influencé. Par contre, les films gothiques Universal m’avaient beaucoup marqué adolescent. Ces 5 ou 6 films, avec ce magnifique noir et blanc, c’était vraiment fantastique. Je me souviens en particulier de ceux d’Erle C. Kenton (2), La Maison de Frankenstein, La Maison de Dracula et surtout le dernier de la série, Abbott et Costello contre Frankenstein (3). J’ai dû voir ce film une vingtaine de fois ! Je l’aimais vraiment beaucoup, car si les autres films me terrifiaient totalement, au point d’en faire des cauchemars horribles, dans celui-ci les scènes comiques arrivaient à temps lorsque vous étiez trop effrayé. C’était vraiment très bien fait.