Annuaire boutique
Librairie Lis-Voir
PriceMinister
Amazon
Fnac

     


 

 

 

 

 
Brian De Palma (c) David Lombourg BRIAN DE PALMA
A l'occasion de la sortie
de Femme Fatale
Entretien réalisé à Paris en 2002
Par Gilles LYON-CAEN et Cécile GIRAUD
Traduction de Denis RITTER
Photos de David LOMBOURG


Brian De Palma laisse parler ses films. Lui n’accorde que de rares entretiens. C’est dire si, pour une fois, Objectif cinéma se devait de s’engouffrer dans une actualité urgente, et de profiter en tant que privilégié, d’une certaine vague de promotion autour de la sortie, le 30 avril, de son dernier film Femme fatale, qu’a précédé la fabuleuse rétrospective du Centre Pompidou. Nous avons cherché à percer le mystère De Palma, comprendre pourquoi le plus brillant des cinéastes actuels, fin expérimentateur théorique, privilégiait l’image au discours. Débusquer, au passage, les secrets de conception et de montage de Femme fatale (le scénario du film est diabolique), en tirant les fils d’une interprétation qui appelle toujours au renouvellement, au doute, à la multiplication ou suspension du sens. De Palma semble à l’image de ses films : deux visions s’imposent, une pour le plaisir, une seconde pour apprécier pleinement. Et rêver.


  Femme fatale (c) D.R.

Objectif Cinéma : Pourriez-vous tout d’abord nous dire quelques mots sur la génèse du projet et de ce personnage de femme fatale ?

Brian de Palma : Depuis longtemps j’avais en tête un personnage de femme fatale qui, en compagnie d’associés, dévalisait un casino, s’enfuyait avec l’argent avant d'être poursuivi à travers tout le pays par ses anciens partenaires. Elle atterrissait finalement dans une petite ville du Midwest où elle se cachait un certain temps, jusqu’à ce que quelqu’un l’aborde dans la rue et s’adresse à elle sur un ton familier en l’appelant Betty. Elle comprenait alors qu’il y avait en ville une femme qui s’appelait Betty et qui lui ressemblait trait pour trait. C’était l’idée de départ.


Objectif Cinéma : Pourquoi avez-vous ressenti le besoin de créer ce personnage maintenant ? Diriez-vous qu’il participe d’une certaine continuité dans votre travail ?

Brian de Palma : C’est juste une idée qui était présente dans un coin de mon cerveau depuis un certain nombre d’années et qui m’est tout à coup apparue comme une base de départ acceptable pour un film. J’ai toujours aimé le film noir et j’ai essayé d’en réaliser un qui colle à la réalité de 2002, qui n’est plus la même que celle des années quarante ou cinquante, même si les thèmes et les personnages restent, notamment ces femmes ensorcelantes qui conduisent les hommes à leur perte. Cela a été passionnant de tenter d’utiliser les canons du genre pour raconter une histoire moderne.


Tournage de Femme fatale (c) D.R.

Objectif Cinéma : On a l’impression d’un regard différent sur les femmes de votre part, avec la création de ce personnage qui mise tout sur l’apparence et l’attirance physiques.

Brian de Palma : Je pense que sa beauté est effectivement un atout essentiel, mais c’est également une femme très intelligente et une grande comédienne. Elle joue des rôles différents, elle manipule ceux qui l’entourent et a recours à la ruse pour parvenir à ses fins.


Objectif Cinéma : Ce film est-il une métaphore de l’image manquante, ce concept qui revient de façon obsédante dans votre œuvre ? Marque-t-il la fin d’une quête de la fameuse image manquante ?

Brian de Palma : Pas véritablement. Ce film représentait un défi du point de vue de la mise en scène, qui devait permettre à l’histoire de fonctionner. Placer en quelque sorte ce récit à l’intérieur d’un cadre onirique m’a permis de concilier le film noir et une forme narrative très contemporaine.