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Objectif
Cinéma : On dit souvent
que les films d’Amos Kollek sont très réalistes,
pessimistes mais réalistes. Avec Bridget, on
a plutôt l’impression qu’il s’agit d’un rêve.
Ca semble totalement fantasmatique. Il lui arrive tellement
de choses…
Anna Thomson : Ca a été
un peu inspiré de ma vie. J’ai vécu beaucoup
de choses bizarres, qui se traduisent dans sa façon
de raconter l’histoire au cinéma. Pour moi, si le film
est fantasmatique, c’est parce qu’il y a, à la fin
du film, un happy end que je n'ai pas connu dans la réalité.
Mais je crois que Amos veut me dire qu’il y a la possibilité
d'une fin heureuse, même si elle ne m'est pas arrivé.
Objectif Cinéma :
Vous avez écrit le scénario ensemble ?
Anna Thomson : Non, mais on
a beaucoup voyagé avec Amos en six ans, depuis Sue
perdue dans Manhattan, en taxi, en avion, en Russie, à
Paris… Je lui ai raconté beaucoup de choses sur ma
vie, il les a retranscrites dans son style et sa façon
de raconter une histoire.
Objectif Cinéma :
Sue, Fiona et Bridget, les considérez-vous comme une
même personne, ou les abordez-vous différemment ?
Anna Thomson : Je pensais qu’elles
étaient toutes les trois différentes, mais tout
le monde me dit qu’elles sont identiques… Peut-être
que c'est vrai : si quelqu'un le voit, c’est que ça
doit être présent quelque part. Ce sont trois
femmes solitaires à New York… J’espère qu’elles
sont différentes. Je les imagine différemment
afin de ne pas répéter ce que j’ai déjà
fait auparavant.
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Objectif
Cinéma : D’ailleurs,
Bridget se transforme beaucoup dans le film : elle porte
des perruques, traverse différents pays… C’est un personnage
complexe…
Anna Thomson : Mais tout le
monde est complexe…. Au cinéma, surtout à Hollywood,
il est très rare de voir un personnage complexe, la
tendance est plutôt à les simplifier. En littérature,
les personnages sont plus épais, le problème
du temps ne se pose pas, par exemple. Sue était complètement
coincée. Fiona était coincée sans en
avoir conscience, elle pensait qu’elle était libre,
mais ne l'était pas. Sue, c’est le récit de
six semaines de sa vie, Fiona a une vie assez courte sans
beaucoup de rebondissements. Avec Bridget, on raconte dix
ans de la vie de quelqu’un.
Objectif Cinéma : C’est
aussi votre corps qui se transforme, vous vous dévoilez…
Anna Thomson : Oui, je crois.
Fiona utilise son corps, mais elle s’en fout. Sue, elle est
coincée. Sue perdue dans Manhattan, c’était
mon premier film avec Amos. C’était super, mais en
même temps, j’étais moins sûre de lui,
on ne savait pas si ça allait marcher ou pas. Avec
Bridget, on s’est encore posé la question, mais
si on ne saute pas - même dans le noir- ça ne
marche pas : alors on a sauté.
Objectif Cinéma :
Beaucoup de personnages secondaires gravitent autour de Bridget.
Aucun n’a vraiment d’importance, à part son fils qu’on
ne voit qu’à la fin, et son mari qu’elle n’accepte
physiquement qu’à la fin… La fin, c’est la vie dont
elle rêve…
Anna Thomson : Oui, c’est vrai. Elle se disait qu’elle
combattait quelque chose, mais ce n’était pas clair.
Elle pense à reprendre son fils, mais il n’est pas
là. A la fin, elle décide de la vie qu’elle
veut avoir. Et c’est rare de l’obtenir totalement.
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