Annuaire boutique
Librairie Lis-Voir
PriceMinister
Amazon
Fnac

     


 

 

 

 

 
Le Temps retrouvé (c) D.R. BRUNO BEAUGÉ
Décorateur du film
Le temps retrouvé
Entretien réalisé le 28 mars 2002
Par Alexandre TSEKENIS


Fidèle collaborateur de Raoul Ruiz, Bruno Beaugé est un décorateur qui aime donner une vraie place à l'objet, transformer le meuble et l'accessoire en "acteur". Il évoque son parcours et sa contribution à l'univers onirique du film Le temps retrouvé (1999).

Dans cette œuvre hantée par le rêve et le souvenir, le décor accompagne les allers-retours narratifs entre passé et présent, et se laisse envahir de statues qui nous interpellent et créent une impression proustienne, à la manière des visages familiers d'acteurs qui traversent le film, sollicitant notre mémoire de spectateur.



  L'Hypothèse du tableau volé (c) D.R.

Objectif Cinéma : Comment êtes-vous venu au décor de cinéma ?

Bruno Beaugé : De façon détournée, mais après une formation classique : l'Union Centrale des Arts Déco (l'école Camondo) où l'on étudie l'architecture intérieure et surtout le design, l'objet. A ma sortie en 1971, j'ai été coopérant comme attaché culturel à l'ambassade de France à Yaoundé et m'apprêtais à continuer ce genre de carrière, mais le contexte de décolonisation n'était pas alors très favorable.

Je me suis alors présenté au service décoration de l'ORTF, et me suis retrouvé décorateur sur une fiction en vidéo mobile : c'est-à-dire un car qui partait tourner en province avec 3 ou 4 caméras vidéos.

J'ai continué sur des dramatiques à la SFP, et surtout pour l'INA qui, sans grands moyens, produisait des films passionnants, avec une ouverture d'esprit extraordinaire et une volonté d'innover. Là, j'ai eu la chance de rencontrer de gens très créatifs : Thierry Garrel, Philippe Colin, Patrick Jeudy, Sacha Vierny, François Ede, Sacha Vierny... et bien sûr Raoul Ruiz dont j'ai fait un des premiers films en France : La vocation suspendue, un film étrange, surréaliste et baroque, bien dans le goût Ruizien.

J'étais heureux qu'il me demande pour son film suivant : L'hypothèse du tableau volé, puis pour Les 3 couronnes du matelot.

Après le démantèlement de l'ORTF, les embauches se sont faites plus rares. J'ai continué le décor de film tout en tenant un stand aux Puces de Saint-Ouen : objets de curiosité scientifique, ou éthnographiques, de l'art primitif, un peu de peinture... J'ai ainsi élargi mon champ de vision, et mes connaissances en histoire de l'art.


Le Temps retrouvé (c) D.R.

Objectif Cinéma : Cette activité a-t-elle influencé votre travail de décorateur ?

Bruno Beaugé : Oui, car j'ai attaché à l'objet une importance que je ne lui donnais pas initialement. J'ai inversé la conception que j'avais du décor de cinéma : finalement, il n'a pas une si grande importance, ce qui est important c'est l'accessoire, l'objet immédiat. C'est lui qui crée la relation du comédien avec l'espace, qui matérialise le fantasme du réalisateur.