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Iliana Lolic (c) D.R. ILIANA LOLIC
De l’écran, à l’écriture, à l’écran
Entretien réalisé à Paris le 9 juin 2002
Par Francis GAVELLE


De retour sur les écrans avec Les Naufragés de la D17, le dernier film de Luc Moullet, Iliana Lolic est une actrice qui a préféré passer de l’autre côté de la caméra. Il était donc temps, profitant de cette occasion, de faire la lumière sur cette jeune femme, pudique dans l’expression de son intimité et généreuse dans son approche de la vie et du cinéma.


DE L’ECRAN : L’ACTRICE

  Les Naufragés de la D 17 (c) D.R.
Objectif Cinéma : Iliana Lolic, vous êtes une actrice à la présence plutôt rare sur les écrans et pourtant à l’occasion de la sortie des Naufragés de la D17, j’ai le sentiment que la presse vous met en avant avec un certain plaisir : photos de vous en illustration d’articles, papiers insistant sur votre composition (le plus emblématique étant cette déclaration d’amour cinéphilique de l’écrivain Patrick Besson dans les colonnes de V.S.D.). Alors pourquoi cette rareté de votre part ?

Iliana Lolic : Parce que je ne cherche pas à travailler en tant qu’actrice… En fait, je n’ai jamais été très heureuse en tant qu’actrice. Je n’ai certainement pas eu des rôles qui m’ont comblée. C’est certainement de ma faute : je ne les ai pas eus, parce que je n’ai pas réussi à les avoir et je n’ai pas réussi à les avoir, parce que je n’étais pas l’actrice qu’il fallait aux metteurs en scène qui m’intéressaient. Peut-être, aussi, tout simplement, parce qu’il y en avait de meilleures que moi. C’est ce que je me suis dit.


Objectif Cinéma : Peut-être n’avez-vous pas rencontré les réalisateurs qui auraient pu vous donner envie d’être une actrice plus présente ?

Iliana Lolic : Mais j’en ai rencontré, je crois. Vous voyez, j’ai même oublié ! Non, pour moi, être actrice, c’était rentrer dans le monde du sentiment ; mais je n’avais pas conscience de la réalité, du travail que représente ce métier. Quand j’ai commencé à prendre des cours, je n’avais pas une attitude d’actrice : j’avais du mal à saisir un rôle dans sa globalité, je ne savais pas par quel bout le prendre, j’arrivais juste à l’appréhender scène par scène. Je crois que j’avais une idée du métier totalement fausse.


Pedro Almodovar (c) D.R.
Objectif Cinéma : C’était quoi, cette idée totalement fausse ?

Iliana Lolic : Ce que je vais dire est terrible, mais je vais le dire ! Quand j’étais petite, je me souviens que ce que je voyais du monde ne me plaisait pas tellement. Je préférais imaginer les choses. Après, quand j’ai été adolescente, j’étais assez jolie et on me disait souvent : " Ah, tu es très jolie ! Tu devrais être actrice. " Et là, actrice et rêverie se sont mélangées. J’ai pensé qu’être jolie était suffisant et, finalement, cette idée de la joliesse m’a handicapée, parce que c’était plus une image qu’une interprétation.


Objectif Cinéma : Quels cinéastes pourraient aujourd’hui vous redonner envie d’être plus présente ? Pedro Almodovar ?

Iliana Lolic : Lui, j’adore !


Objectif Cinéma : Pourquoi ? Le cinéma a-t-il tout à voir dans votre réponse ou vos origines, en partie espagnoles, y sont-elles liées  ?

Iliana Lolic : Les origines jouent certainement. Il est profondément espagnol et je retrouve, dans son cinéma, un univers d’Espagne que je connais bien : l’univers des femmes, des femmes entre elles, même s’il y a dans son très beau Parle avec elle deux magnifiques portraits d’hommes. Ce qui me touche aussi beaucoup chez lui, c’est l’amour qu’il porte à sa mère. A mon avis, sa mère est une muse. Je crois d’ailleurs que, pour être un grand créateur, il faut avoir une muse. Elle peut prendre toutes les formes, mais c’est une figure qui finit par prendre le dessus, qui vient de loin, souvent de l’enfance et la mère en est le symbole. Elle est la maman, cet être dévoué, aimant, qui donne tout pour ses enfants. C’est-à-dire, dans la tradition catholique espagnole, la mère plus que la femme.