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Freaks (c) D.R. FREDERIC THIBAUT
Organisateur du festival
Extrême Cinéma
Par Yves GAILLARD


" C’est vouloir dépasser des appellations un peu creuses, comme " bis ", " série b ", qui ne veulent plus rien dire. Ces termes suffisent pour une conversation de comptoir, mais pas pour asseoir théoriquement un programme ", nous dit Frédéric Thibaut (plus connu sous le pseudonyme de Professeur Thibaut), l’un des trois organisateurs du festival Extrême Cinéma qui s’est tenu à Toulouse du 25 au 31 mai 2002 pour la 4e année consécutive.



QU’EST-CE QUE L’EXTREME ?


  La Tigresse du Goulag (c) D.R.
Selon un principe établi depuis la création du festival, chaque programmation s’élabore autour d’un thème ou d’une notion qui se distingue par une sorte " d’exigence d’immoralité " : tout ce qui transgresse les normes, esthétiques et sociales, trouve ainsi sa place dans le programme du festival. Et en particulier les monstruosités étranges qu’ont pu engendrer des expériences limites de tournage, de production, ou d’ambitions artistiques impossibles. Voyez les films du peintre-sculpteur Mario Mercier, passé à la mise en scène avec La Goulve (1972) et La Papesse (1974), pour comprendre.

" On est un peu des déterreurs, mais on ne déterre pas des cadavres, mais des films ". Le travail de déterreur, Fred Thibaut connaît bien pour avoir animé plusieurs années durant les Faubourgs du Cinéma, écran ouvert aux films condamnés par leur laideur ontologique (Ilsa, La tigresse du Goulag !), ou injustement oubliés, comme le chef-d’œuvre d’ Alexandre Ptouchko Le Géant des Steppes.

Cependant, et c’est là où la distinction introduite entre " bis " et " extrême " prend tout son sens, la finalité des organisateurs n’est pas - seulement - d’offrir à son public des incunables  psychotroniques, mais de provoquer une confrontation entre les films. Que le festival prenne place au sein de la Cinémathèque de Toulouse, perpétue une pratique aventureuse de la programmation, qui devrait être soit dit en passant le souci premier de toute cinémathèque. Il suffit de se reporter aux programmations précédentes de l’Extrême pour rencontrer ces rapprochements improbables, ces passerelles lancées dans l’histoire du cinéma, comme un défi à sa réduction à un " patrimoine ". Ainsi le thème de " La Monstrueuse Parade " en 2001, fit voisiner, au côté des incontournables Freaks ou Le Mari de la Femme à Barbe, le moins évident L’Enfant Miroir (1990) de Philip Ridley, peut-être un des plus beaux films sur les affres de l’enfance jamais tourné, et le totalement impossible Kenny (1985), documentaire-fiction sur un (vrai) enfant tronc.

Les intentions de l’Extrême Festival dépassent donc la simple " exploitation " du cinéma " bis " - qui entraîne dans son sillage le risque réel d’un nivellement du goût -, pour s’inscrire dans une exploration sans complexe des modalités de la transgression.



  Thérèse (c) D.R.
Objectif Cinéma : Quel est le projet de l’Extrême Cinéma ?

Frédéric Thibaut : On pourrait dire que les films se regardent, se répondent. Par exemple cette année, mes bases pour élaborer le programme de " Rites d’Amour et de Mort " étaient Thérèse, L’Empire des Sens, et les Diables. Pourquoi Thérèse ? Mais parce que c'est c’est un film extrémiste dans ses choix de mise en scène, et dans son sujet.

Un autre de nos buts est de produire du texte. Il est bon d’associer les films avec leur contexte, leur mouvance artistique, leur parcours. Sur les " Faubourgs ", on faisait une plaquette type fanzine, à chaque séance ; ici, on propose des textes un peu plus poussés sur les invités, les films…


Objectif Cinéma : Quelle a été la fréquentation de l’Extrême cette année ?

Frédéric Thibaut : Etonnamment bonne ! Nous avons été les premiers surpris. Extrême Cinéma a attiré environ 60 personnes à chaque séance (il y avait environ 25 séances). Pour Toulouse, avec une telle programmation, c’est plutôt bien ! Lorsque tu programmes les Diables ou l’Empire des Sens, il n’y a aucun souci : les gens viennent, le terrain est balisé, mais pour The Pain Game (1), La Goulve (2) ou Vase de Noces (3), c’est une autre paire de manches. Là je ne sais pas ce qui s’est passé, les gens sont venus. Peut-être à cause du programme très synthétique, très ramassé. Ça nous a pris pas mal de temps pour le faire. A priori le festival a bien marché ou alors les gens sont venus parce qu’ils n’avaient tout simplement rien à faire de leurs journées !