DE
LA PUB AU PETIT POUCET
Le décor du Petit Poucet est signé Michel
Barthélémy. Enfant de la pub, il conçoit
les décors de dizaines de clips et films publicitaires
- et non des moindres - entre 1984 et 1995, et enchaîne
à présent les long-métrages, alternant
productions spectaculaires (comme Blueberry actuellement
en post-production) et films plus intimistes (Harry, un
ami qui vous veut du bien, Sur mes lèvres...).
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Objectif Cinéma
: Comment un producteur français
trouve-t-il aujourd'hui le moyen de financer un film entièrement
(ou presque) tourné en studio ?
Michel Barthélémy
: Par un travail d'évaluation du coût du décor
avant même sa conception. Avec deux assistants, nous
avons passé huit jours - payés par la production
- à tenter d'établir le budget et les différentes
solutions techniques de décor envisageables. Nous avons
ainsi préparé un solide dossier, destiné
à convaincre les financiers. Le budget décor
est de 14 ou 18 millions environ, selon que l'on inclue ou
pas les repérages, les locations studios, etc. Cela
représente plus du quart du budget total* (environ
57 M de francs, soit 8,6 M d'euros - ndlr).
Le film a été effectivement entièrement
tourné en studio, excepté quelques plans d'une
rivière pour le générique de fin, ainsi
que l'intérieur du château de la Reine.
Objectif Cinéma
: Le parti-pris esthétique
est très affirmé. Etait-ce la volonté
du réalisateur ?
Michel Barthélémy
: Olivier Dahan, qui a fait les Beaux-Arts et dessine lui-même
beaucoup à l'aquarelle, voyait son film comme un livre
d'images que l'on feuillette, avec un décor théâtral
et volontairement expressionniste. Par ailleurs, il voulait
dépasser le stade des toiles peintes et des trucages
à la Méliès, à l'aide des moyens
numériques.
Une fois le financement du film assuré, nous avons
formé un bureau de dessin collectif, ou ensemble (réalisateur,
chef opérateur, et décorateur), nous avons réfléchi,
dessiné, rassemblé beaucoup de documentation.
Pour chaque décor, nous travaillions un thème
(la forêt, une maison d'ogre, etc) et comment le traiter,
avec quelles références, quelles couleurs dominantes.
Par exemple, pour la maison de l'ogre, nous pouvions opter
pour un dessin tarabiscoté à la Viollet-le-Duc,
ou aller vers un style plus "celte" comme l'ont fait Le
Seigneur des anneaux ou Sleepy Hollow. Finalement,
elle est basée sur un dessin d'Olivier Dahan, qui la
rapproche plus des Carpates ou de l'Europe centrale.
Du côté pictural, nous sommes allés vers
Münch, les fauves, ou l'expressionnisme allemand. Olivier
Dahan avait en tête des films comme Moonfleet
ou La nuit du chasseur. Il souhaitait également
des ruptures de ton, des couleurs déstabilisantes,
pour éviter de s'enliser dans un série trop
linéaire.
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