Objectif Cinéma :
Pensez-vous que le sujet, les mathématiques, peuvent
faire déconnecter une partie du public ? Darren Aronofsky :
Pi n'est pas un film à propos des maths. Le plus
dur problème dans le film consiste en l'opération
41+ 3 et nous donnons la réponse 3 secondes plus tard.
Donc nous ne demandons pas au spectateur de venir au cinéma
avec une calculatrice. L'idée était que les gens,
au fil des années, utilisent les nombres pour chercher
Dieu. Il y existe un aspect mystique des mathématiques
de Einstein, qui était un homme de foi, à Pythagore,
il y a 25 000 ans, qui pensait que l’Univers était régi
par des nombres. Certains chercheurs les utilisent pour comprendre
leur monde et l'Univers, c'est ce concept qui m'intriguait.
Personnellement, je détestais les maths au lycée,
comme tout le monde, probablement. J'échouerai certainement
si vous me donniez un test maintenant. Mais Sean est vraiment
quelqu'un de très appliqué et qui aime comprendre
de nouvelles choses. Lorsque nous avons commencé, il
ne pouvait même pas écrire de chiffres, et une
partie de son travail, quand il rentrait le soir, était
d'écrire les chiffres de 1 à 50 et ils devenaient
ainsi plus lisibles pour la caméra.
Objectif Cinéma :
Pourquoi avez-vous opté pour le Noir & Blanc
?
Darren Aronofsky :
Qu'est ce que cela ? (Darren Aronofsky montre du doigt
un schéma sur la fiche de questions, qui est en fait
un exercice de maths, question que j'avais prévu
de lui poser puis annulée suite à sa déclaration
selon laquelle il détestait les maths et ne serait
capable de résoudre un problème. Amusé,
Darren regarde ...) D.A- X=O. Je ne peux pas le résoudre,
aucune chance.
(nous reprenons le cours de l'interview) C'était
une décision purement créative. Pi
a toujours été un film différent pour
les spectateurs parce que nous croyons que pour chaque Armageddon
sorti, ce qui est très important, on trouve un public
pour ce type de film, il y en a toujours un autre pour un
genre de films différent. Donc nous avons voulu faire
un film radicalement différent et lorsque nous avons
choisi le Noir et Blanc nous ne voulions pas tourné
un film en Noir et Blanc traditionnel. C'est pourquoi il
est appelé "Black & White reverseal" (Noir et
Blanc revirement). Le premier film tourné en "reverseal",
la première fiction, était celui de Bruce
Weber, Let's get lost (1988), un film incroyable,
un documentaire à propos d'un joueur de trombone.
Ce qu'apporte le "Black & White reverseal" c'est qu'au
lieu de faire du blanc et du noir, il donne du noir OU du
blanc. Le film n'est pas gris.
Objectif Cinéma :
Vous utilisez un format différent du 1.33 ?
Darren Aronofsky :
C'est du 1.66. On ne voulait pas tourner en 1.33 parce que
ce format est difficilement exploitable aux Etats-Unis.
Le 1.66 est généralement utilisé en
Europe, maintenant aux Etats-Unis on utilise du 1.85. Mais
la véritable raison est la suivante : 1.66 fait référence
au ratio d'or. 1.66/1 est très proche du rectangle
d'or dont nous parlons dans le film, ce qui nous permet,
avec ce ratio d'être plus proche des mathématiques
dans le film. Le ratio d'or est intéressant, on le
voit partout : tous les buildings sont basés dessus,
tous les temples grecs, ainsi que les cartes de crédit
!
Objectif Cinéma :
A propos de la musique, aviez-vous
rencontré Clint Mansell auparavant ?
Darren Aronofsky : Nous nous sommes rencontrés
au début du projet. Il habitait New York City et
je n'étais pas vraiment un fan de musique électronique,
je ne la connaissais pas tellement. Mon producteur, Eric
Watson, l'était plus et il nous a présenté.
Dès que j'ai commencé à connaître
Clint et d'autres musiciens "électroniques" comme
Massive Attack et d'autres personnes qui ont participé
au film, j'ai réalisé que cet homme était
plus comme Max Cohen (le protagoniste de Pi), qui vit avec
de vieux ordinateurs en cherchant l'âme avec une machine.
Ils étaient donc parfaits pour le film, avec cette
ambiance de sons électriques, avec une sorte de symétrie
"Black or White" très abstraite. J'ai pensé
que cela pouvait être un paysage très intéressant.