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Objectif Cinéma :
La première remarque qui vient à l’esprit
en voyant le film, c’est que vous faites vraiment la classe…
Comment avez-vous trouvé la force et l’énergie
pour vous retrouver face à ces 30 enfants ?
Philippe Torreton :
C’est avant tout le désir d’être à la
hauteur de l’attente des enfants : c’est ça
qui me faisait peur. Les enfants étaient issus d’une
vraie classe, et non pas d’une classe recomposée
pour les besoins du cinéma. Donc les enfants se connaissaient,
avaient l’habitude de travailler ensemble. Mais par contre
ils ne me connaissaient pas du tout, et moi non plus. Mon
désir était de leur faire oublier que j’étais
un instit occasionnel et qu’on allait faire semblant. Le
challenge était qu’il n’y ait pas pour eux un instit
qui fait n’importe quoi et le vrai a côté.
Du coup cela a permis une relation vraie entre eux et moi,
basée sur les vraies activités de l’école.
J’ai essayé d’être comme le vrai instituteur,
en racontant des histoires, en m’investissant dans la façon
de raconter les histoires, de faire les comptines, les activités
de découpage, d’écriture, dans la cour de
l’école … Je jouais avec eux. Je m’amusais autant
à être un instit que eux à être
avec moi dans leurs activités à l’école.
Objectif Cinéma :
C’est justement très
réussi, notamment dans la scène avec l’inspecteur
qui vous montre longuement exercer face aux enfants, et
aussi dans la scène de la danse, lors de la fête
de l’école, dans laquelle vous accompagnez les enfants
pour les rassurer … Vous apparaissez vraiment comme un instituteur,
et c’est un performance lorsque que l’on connaît les
enfants, qui ont leur propre rythme, et une capacité
d’attention limité, surtout si jeunes.
Philippe Torreton :
c’est justement ce qui me faisait un peu peur, je craignais
qu’ils soient un peu moins réceptifs à moi,
à ce que j’allais leur dire. J’avais peur qu’ils
n’acceptent pas ce jeu même si ils avaient été
bien préparés à l’avance par l’équipe
du film et notamment par Tiffany Tavernier qui était
là depuis très longtemps, qui leur a expliqué
ce qu’était un film, une caméra, qui leur
a raconté l’histoire, et ce qu’on allait faire. Donc
ils savaient que quelque chose de bizarre allait se passer.
Mais entre ce quelque chose de bizarre et la réalité
de ce que c’était, il y avait un petit pas à
franchir que j’appréhendais. Ce qui est incroyable
avec les enfants, c’est qu’ils vous mettent tout de suite
au diapason avec les vraies choses. L’erreur aurait été
de préméditer trop de choses avant, de s’embarquer
dans des considérations de personnages. Il fallait
simplement être présent avec eux, y aller,
mettre sa pudeur et sa timidité de côté.
Il est vrai que les enfants intimident. Avec eux, le moindre
incident est noté, amplifié, déformé
par les 30 enfants. La moindre petite goutte de sueur qui
trahit une petite crispation et c’est tout de suite (Philippe
prend une vois enfantine) " Oh, pourquoi tu sues ?
Oh, pourquoi ça coule sur ta joue ? Tu pleures ? "
ou quand je me trompe sur le prénom d’un élève,
c’est aussitôt " Ah, non, tu t’es trompé ! "
… Il faut dire que ça c’est bien passé, alors
c’est extrêmement agréable. Mais en même
temps je ne vois pas comment ça aurait pu mal se
passer.