Cinélycée
: L’armée israélienne
est d’une extrême brutalité avec la population
palestinienne. Qu’est-ce qui peut justifier une telle attitude ?
Ces tortures, ces humiliations, cette violence constante,
quotidienne, y compris contre des non combattants ?
Jacques Tarnero
: Oui, c’est indéfendable. C’est la guerre qui veut
cela. Est-ce que l’on peut faire la guerre autrement. Je ne
sais pas.
Cinélycée
: Certains défenseurs
de la cause palestinienne disent que la bombe humaine, ce
n’est pas différent d’un lance roquette. C’est une
façon de faire la guerre, là aussi.
Jacques Tarnero
: Non, je ne suis pas d’accord avec cela. La bombe humaine
c’est une invention nouvelle, inouïe. C’est un suprême
raffinement dans la barbarie humaine. C’est quoi le sens d’un
attentat à Tel Aviv ? D’un attentat contre un kiboutz
d’extrême gauche? Un kibboutz de pacifistes ? Du côté
palestinien, un bon israélien est un israélien
mort.
Cinélycée
: Alexandre Adler, dans votre
film, dit que la gauche bien pensante, en France, se range
dans le camp des islamistes en Algérie. Implicitement,
il semble donc suggérer que les gens avisés,
(comme lui), feraient bien de soutenir le gouvernement algérien,
en tant que rempart contre l’islamisme.
Jacques Tarnero
: Non. Il ne dit pas qu’il faut soutenir le gouvernement algérien
. Il dit qu’il y a une lecture biaisée du conflit israélo-palestinien
qui transite par l’algérie. Les palestiniens sont devenus,
pour beaucoup de français qui se souviennent de l’Algérie,
des figures substitutives des algériens, à l’égard
desquels on s’est comportés comme vous le savez ; c’est
donc une façon pour nous de soulager notre conscience.
Cinélycée :
Vous contestez constamment, dans le film, le terme de " colonialisme
" pour caractériser la position d’Israël. Il y
a bien des territoires occupés, pourtant ? Jacques Tarnero
: Je ne conteste pas qu’il y ait occupation. Oui il y a des
territoires occupés. De ce point de vue on est dans
un système de colonisation. Pour moi, il faut évacuer
les territoires occupés. La fidélité
au cadastre de la Bible est suicidaire. Mais pour les palestiniens,
tout Israël est une colonie. Si c’est le cas, alors c’est
tout le peuple israélien qui doit repartir.
Cinélycée
: Si nous comprenons bien,
la thèse du film, c’est que pour les palestiniens,
la guerre n’est pas un moyen (de gagner la paix), mais une
fin en soi.
Jacques Tarnero
: Non. Je ne dirais pas cela. Pas pour les palestiniens. Mais
c’est vrai que pour les dirigeants, la guerre est une rente
de situation. Faire la paix , c’est une autre affaire.