KAMAKURA, L’APRES-MIDI
J'aime beaucoup Satoshi Kon, son enthousiasme, sa générosité
à partager ses élans de création, son
dandysme, son intelligence. Incontestable metteur en scène,
sa Chiyoko mérite de figurer aux côtés
de Chihiro. Mais son petit studio, où se déroule
cet entretien, n'est pas le Studio Ghibli. Il est d'ailleurs
peu probable qu'un autre cinéaste d'animation au Japon
atteindra un succès semblable à celui de Miyazaki.
Néanmoins, si Berlin avait enfin le courage d'admettre
que le dernier grand maître classique du cinéma
japonais œuvrait dans l'animation, d'autres festivals hors
des circuits de l'animation seraient avisés de garder
l’œil sur Satoshi Kon.
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Objectif
Cinéma : Etiez-vous
surpris de l'accueil international pour Perfect Blue ?
Et est-ce que son succès vous a permis de prendre le
temps de bien préparer Chiyoko ?
Satoshi Kon : Complètement
! Mais également ravi. Ceci dit, cela s'est traduit
en termes de notoriété plutôt qu’en profits
financiers! Mais cela nous donnait la preuve nécessaire
auprès des producteurs, qu'un scénario original
pour un film d'animation pouvait également réussir.
Pratiquement tous les films animés aujourd'hui sont
adaptes de séries télé ou mangas. Le
scénario de Chiyoko a demandé beaucoup
de temps, en raison de tous les détails historiques.
Nous l'avons eu. Je rentre de Los Angeles, les gens de DreamWorks
voulaient voir le film. Nous attendons maintenant, ils ont
exprimé un intérêt pour les droits d'adaptation
et de distribution aux USA.
Objectif Cinéma : Au
départ, Chiyoko c'était votre idée,
mais la structure, le film dans le film, ressemble aussi à
celle de Perfect Blue. Est-ce le style de M.Murai ?
Satoshi Kon : Je dois vous
rappeler que j'ai également participé au scénario
de Perfect Blue, l'intrigue, le développement,
etc. Mais Murai est quelqu'un qui vient de l'univers des médias,
de la télévision, il affectionne cette idée
du cinéma qui parle du cinéma, ou de la télévision.
Dans les deux films, le milieu de la télévision
est dominant.
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Objectif
Cinéma : Dans l'entretien
que vous avez fait avec le psychologue Masao Yokota, vous
disiez que Chiyoko vous a permis de redécouvrir la
culture Japonaise. De quelle culture vous sentiez vous plus
proche, et avec quel aspect de la culture Japonaise avez-vous
renouer ?
Satoshi Kon : Je ne sais pas
s'il est juste d'employer le terme " renouer ".
Disons que ma connaissance de la culture japonaise était
avant tout celle de l'après-guerre, y compris l'histoire
du pays depuis cette période. Mais avec Chiyoko,
je me suis penché sur les périodes qui ont précédé
cette époque. Je ne dirais pas que je suis devenu spécialiste
des costumes d'époque, ni historien ! Mais pour les
besoins du projet, nos recherches nous ont mené à
regarder des classiques du cinéma japonais, à
consulter des ouvrages de référence sur les
kimonos, le maquillage, l'architecture, etc. Auparavant, comme
vous le savez, je baignais dans un univers cinématographique
qui était celui du suspense occidental.
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