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  Chiyoko Millenial Actress (c) D.R.
Objectif Cinéma : Votre film s'ouvre sur la destruction des studios Ginei. Pensiez-vous à ce qui s'est produit avec ceux de Shochiku ? Y avait-il un modèle précis de studio auquel vous faisiez référence, ou était-ce une synthèse de toute l'époque des studios ?

Satoshi Kon : Vous avez tout à fait raison, je me suis inspiré de la démolition des studios Shochiku à Ofuna. Je suis allé faire des photos lorsque cela s'est produit. Cependant, le studio Ginei dans mon film serait plutôt la synthèse des grands studios Japonais, à l'image de tous les genres cinématographiques dans lesquels Chiyoko a tourné. Une autre référence importante est celle de la destruction des studios Toei qui m'a beaucoup marqué ; là encore, je faisais des photos et je voyais l'équipe du chantier jetant aux rebuts l'histoire de ce studio : décors, accessoires, affiches, tout y passait. Je voulais surtout communiquer ce sentiment de perte et d'insouciance par rapport à cette disparition de l'histoire. J’étais très triste de témoigner de tout cela. Certaines des photos prises ont inspiré les plans et les planches pour l'ouverture du film. Pas toutes, bien entendu, car j'en ai tellement pris...

Objectif Cinéma : Il faut faire un livre ! Le jeune assistant, Ida, ne cesse de dire au début que Chiyoko, " elle est vieille, bizarre ". Exprime-t-il, selon vous, le point de vue de la jeunesse japonaise par rapport au film, et espérez-vous que votre film rendra des jeunes spectateurs curieux de l'histoire du cinéma Japonais ?

Satoshi Kon : Oui bien sûr, les jeunes Japonais n'ont pas vu les classiques, le noir et blanc ca les ennuie. Mais j'aimerais que Chiyoko les incite non seulement à découvrir l'histoire du cinéma japonais, mais aussi l'histoire et la culture du pays.


Le Château de l'Araignée (c) D.R.

Objectif Cinéma : Parlez-nous de l'inspiration pour les affiches des films de Chiyoko, et les synopsis de ses films, ainsi que des scènes de films que nous voyons à chaque époque.

Satoshi Kon : (Satoshi Kon se lève et va chercher des documents). C'est ma petite équipe qui a fait les recherches iconographiques, afin de repérer le style d'affiche que les studios faisaient selon les époques, selon les genres, en sachant que chaque studio avait plus ou moins son propre graphisme. Ce fut une étape très excitante pour nous, car de mon côté, je concevais avec Murai les synopsis des films de la carrière de Chiyoko, et ces films tracent également l'histoire de sa vie personnelle. Il n'y avait pas de séparation entre ce qui lui arrivait à l'écran et dans la vie, y compris dans les films historiques. Chaque tournage devait la mener de l'avant dans sa quête, cette histoire d'amour avec ce résistant Japonais.


Objectif Cinéma : Pour les cinéphiles, il y a bien sûr le plaisir de trouver/deviner les références; par exemple Le Château de l'Araignée de Kurosawa, lorsque les flèches sont lancées sur Tachibana, ou les sorcières de ce même film, ou les esprits qu'on croise chez Mizoguchi. Puis vous passez aux films de Ninja, ou ceux de Katsu Shintaro, jusqu'aux Kaijyu. C'etait un plaisir pour vous de traverser cette histoire ?

Satoshi Kon : Oui, c'était très agréable, surtout à l'écriture, lorsque nous imaginions ce jeu de pistes, de références, en nous demandant si les spectateurs allaient arriver à faire les liens avec les films cités. Cependant, je dois avouer que je ne suis pas du tout un spécialiste du cinéma japonais ; il y a des références explicites, comme celle que vous avez cité chez Kurosawa, ou Katsu Shintaro. Mais pour le reste, les extraits de films que tourne Chiyoko sont davantage le fruit de souvenirs de films vus à la télé pendant ma jeunesse. Je n'ai pas vraiment revu tous les grands films de l'histoire du cinéma japonais, bien que Chiyoko m'en ait donné envie. Disons que je voulais surtout communiquer l'esprit, la diversité, la richesse de cette histoire du cinéma. Si j'étais véritablement un cinéphile, mon film serait beaucoup plus long ! Mais je fonctionne par bribes, par souvenirs, ce qui m'a offert une certaine aisance dans le mélange des images, dans les transitions, les passages d'un genre a l'autre.