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Objectif Cinéma :
Mais quelque part vous contribuez au communautarisme en
sortant des films gays sous votre label !
Bernard Alapetite :
Oui, mais sans cela, je ne mange pas ! Le problème
est là : c’est qu’on nous oblige à ça : il faut
viser un public précis pour espérer faire des ventes quand
on ne s’appelle pas Canal +.
Cela dit, j’essaye, autant que faire se peut, de mettre
en avant les auteurs des films que j’édite, avec si possible
toute la fiche technique, et en ajoutant de nombreux bonus
pour faire honneur à leur travail. Je ne me contente pas
d’exploiter la poule aux œufs d’or que peut représenter
le DVD.
Objectif Cinéma :
A partir de combien d’exemplaires vendus parle-t-on d’un
« hit » à votre niveau ?
Bernard Alapetite :
Mon souci n’est pas tant de faire un hit que d’essayer de
rentabiliser le maximum de films que je sors. Jusqu’à présent
ça marchait bien, mais il y a des nuages à l’horizon :
l’habillage coûte de plus en plus cher. Beaucoup de labos
ont fait du « dumping », c’est-à-dire que pour
avoir le marché, ils ont travaillé à perte. Ces maisons
ont fait ça quelque temps et elles ont mis la clef sous
la porte les unes après les autres. Il y a donc de moins
en moins de concurrence et une énorme incertitude due à
la déconfiture de Studio Canal qui donnait beaucoup de travail
à ces maisons. Cela a complètement déstabilisé le marché
et ça se ressent même pour nous.
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Cela dit, pour répondre à la question
initiale, notre plus gros succès est O Fantasma,
qui s’est vendu à plus de cinq mille exemplaires, ce qui
est beaucoup pour nous. Alors évidemment, face aux centaines
de milliers de ventes d’Astérix et Cléopatre et de
la dizaine d’autres cartons de ce genre, cela paraît dérisoire.
Mais même si ces films représentent un gros pourcentage
des ventes totales, il ne sont pas représentatifs du marché
du DVD, car des centaines d’autres titres sortent chaque
année, se vendent beaucoup moins, tout en faisant tout de
même l’intérêt de l’édition vidéo, c'est-à-dire donner sa
permanence au cinéma.
Je m’estime heureux cependant, car tous les films que nous
avons sortis à ce jour ont été rentabilisés, à l’exception
de Nous étions un seul homme. Toutes ces ventes phénoménales
ne sont qu’éphémères, pour moi la culture c’est le contraire
de l’éphémère : c’est le souvenir…
Objectif Cinéma :
Est-ce que vous arrivez à générer des bénéfices ?
Bernard Alapetite :
Un peu. Suffisamment pour vivre et pour continuer à m’amuser
en tout cas.
Objectif Cinéma :
A vous entendre on a l’impression
que c’est plus un jeu, pour vous…
Bernard Alapetite :
Oui, mais vous savez, moi j’ai plus de cinquante ans, et
je ne cherche plus vraiment à faire fortune, il faut surtout
que je trouve des choses qui me motivent. De l’argent, j’en
ai eu, j’en ai perdu, maintenant ce qui m’intéresse, c’est
de faire connaître les films et reconnaître le travail de
leurs auteurs. Même s’il n’y a qu’une seule personne qui
découvre un film et que ça lui plait, je pense avoir gagné.
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Objectif Cinéma :
C’est assez étonnant d’entendre
ça de la bouche d’un éditeur !
Bernard Alapetite :
Parce que vous ne connaissez que des marchands de soupe !
On parlait tout à l’heure du créneau gay, mais je pense
qu’il est important aujourd’hui de donner une alternative
à un modèle dominant qui est le schéma hétérosexuel qu’on
nous assène sans arrêt sur TF1. J’espère que mes DVD pourront
aussi servir à ça. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut
sortir son petit drapeau multicolore en permanence, sinon
on va tomber dans une société communautariste avec chaque
petite tribu dans son coin, et où plus personne ne se parlera !
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Les films d’Eklipse
Vidéo sont aussi
disponibles sur le site de vente en ligne
Gay et Lesbien : www.adventice.com
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