Entretien
réalisé
à Paris en mars 2003
Par Romain LEVERN
Pendant de
longues années, Eric Valette, jeune Toulousain d’une trentaine
d’années, a réalisé moult courts-métrages, dont le très
remarqué Samedi, dimanche et aussi lundi (1999),
qui obtint un grand succès dans divers festivals.
En février 2003, le jury du festival de Gerardmer remet un
prix à Maléfique, son premier long-métrage.
La qualité de ce film et cette récompense annoncent-ils les
prémices d’un développement potentiel du genre fantastique
dans l’hexagone ? Peut-on déjà espérer avoir un jour en France
des Dark Water et / ou une nouvelle génération de
frenchy Carpenter ? L’avenir nous le dira. Pour l’instant,
un seul d’entre eux s’est fait remarquer. En bien. Félicité
en personne par William Friedkin, l’une des grandes pointures
du genre (L’exorciste, etc), et plutôt satisfait de
l’accueil du film, Eric est aux anges.
Objectif
Cinéma :
Comment est né Maléfique ?
Eric Valette :
Maléfique remonte à une époque où Canal + Ecriture
essayait de développer des films de genre. Fidélité Production
recherchait d’ailleurs la même chose. Cela a donné lieu à
la collection Bee Movies[NDLR: Promenons-nous dans
les bois, Requiem, Bloody Mallory et Un jeu d’enfants].
A cette époque, les producteurs de Fidélité m’avait appelé
parce qu’ils avaient vu mes courts-métrages. Ils pensaient
que j’avais le profil, mais je n’avais rien à leur proposer.
On a essayé de trouver un projet à faire ensemble. François
Cognard avait écrit un petit pitch, qui s’appelait Exit
et représentait l’équivalent d’un court-métrage (sept ou huit
pages) qui traitait d’un bouquin magique dans une prison.
Il y avait un seul prisonnier à l’origine. Le fantastique
de l’univers lovecraftien présent dans ce matériau
de base me plaisait beaucoup. On a donc développé et étudié
cette idée avec les auteurs, Alexandre Charlot et Frank Magnier.
Objectif Cinéma :
Quelles modifications avez-vous
apportées au scénario de base ? Eric Valette :Il n’y a pas eu de réelles modifications. En réalité,
j’ai découpé le script progressivement On se voyait toutes
les deux semaines avec les auteurs pour modifier des détails,
faire évoluer le scénario dans certaines directions… De ce
fait, on ne m’a pas présenté le script et je n’ai pas fait
des modifications par la suite. A l’arrivée, c’était l’aboutissement
d’un travail en commun.
Objectif
Cinéma : Les
personnages sont tous très typés et distincts. N’aviez-vous
pas peur de tomber dans la caricature ?
Eric Valette :
Oui, c’était le risque. Mais, en même temps, il y a tellement
de films fantastiques où les personnages ne sont pas « écrits »,
que j’ai tendance à penser qu’il est préférable qu’il y ait
des personnages sur-caractérisés plutôt que des personnages
interchangeables qui sont comme de la chair à canon que
l’on donne aux monstres dans de nombreux films d’horreur.
Objectif Cinéma :
Il existe une ambiguïté latente
autour du personnage de Lassale. C’est d’autant plus troublant
quand on sait que Philippe Laudenbach, l’acteur qui l’incarne,
jouait un rôle dans Vivement dimanche de François Truffaut,
auquel Lassale fait singulièrement écho…
Eric Valette :Je ne vous cache pas que cela fait longtemps que je n’ai
pas revu Vivement dimanche. Il joue le méchant dans
Vivement dimanche ?