|
|
|
|
Objectif
Cinéma : A-t-il été difficile
pour vous de faire aboutir le projet ?
Jean-Claude Moireau : Au début,
oui, ce n'est pas facile : quand il s'agit d'un premier film,
on n'a rien à montrer, il faut faire ses preuves. En ce qui
me concerne, j'avais quand même mon travail de photographe,
c'est vrai, mais le scénario est tout de même très fragile
: ce n'est pas l'intrigue qui prime, mais les impressions,
les sensations, il y a peu de rebondissement, pas de chute.
J'ai présenté Signe d'hiver au CNC où il n'a pas dépassé
le stade de la « plénière ». Ça a changé à partir
du moment où il y a eu une maison de production (L'Amour
Fou), qui s'est intéressée au projet et a pris les choses
en main : constitution de dossiers et envoi du scénario aux
régions pour solliciter des aides. Une région a accepté, puis
une deuxième, tout a pu se mettre en place. Je ne soulignerai
jamais assez le rôle qu'ont joué ces régions, Pays de la Loire
et Limousin. D'habitude, on n'a pas le droit de cumuler ces
subventions, on est obligé de choisir, mais vu que le film
avait un petit côté « road-movie », on a pu bénéficier
des deux aides conjointes à condition de tourner dans les
deux régions.
Ma formation de géographe m'a un peu aidé pour les repérages
: en Limousin, je savais où trouver les paysages qui conviendraient
le mieux (le plateau de Millevaches, en Corrèze), cela permet
de gagner du temps.
Ce fut un peu plus compliqué pour la station-service, car
il y en a peu en bordure de route, elles se trouvent de plus
en plus là où il y a des centres commerciaux, même dans de
petits villages, donc on s'est adapté. Après coup, je me suis
rendu compte que j'avais choisi des espaces cinématographiques
plus que des décors précis et j'aime cette "composition"
avec la réalité : il y a des choses qui ne sont pas forcément
écrites dans le scénario mais qui apparaissent avant ou pendant
le tournage. Par exemple, je me suis aperçu que la couleur
verte était un élément récurrent : le vert des forêts, puis
celui des costumes, ensuite il y eu ce bar PMU avec son vert
un peu criard, puis finalement la chambre d'hôtel. C'est une
série de hasards qui deviennent des choix, et je crois qu'il
faut accepter cela si l'on veut prendre le risque que le film
nous dépasse et aille au-delà de ce que l'on aurait pu imaginer.
|
|
|
|
Objectif
Cinéma : Qu'est-ce
qui vous a inspiré le personnage interprété par Cyrille Thouvenin
?
Jean-Claude Moireau : Ce qui
m'intéressait au départ, c'était de montrer quelqu'un de très
ambigu, qu'on ne sache jamais vraiment si ce qu'il dit est
vrai ou pas. Je tenais à ce que pratiquement toutes ses paroles
puissent être mises en doute (je me demande d'ailleurs si
ça n'arrive pas assez souvent lorsqu'on est comme ça, dans
une certaine précarité). Est-ce que ce garçon est vraiment
allé en Finlande ? Est-ce qu'il a vraiment eu un accident
en travaillant sur des chantiers ? Est-ce qu'il s'est vraiment
fait voler ? Est-ce qu'il s'appelle réellement Vincent ? Peut-être
oui, peut-être non.
Ce que je voulais, c'était aussi rester « sur le fil »,
suggérer ces choses très ténues que l'on peut observer dans
la relation qui se développe entre deux êtres (le non-dit,
le poids des mots et des silences) dans un lieu clos auquel
on ne peut échapper (une voiture qui roule) quand il est question
de désir, de séduction et que les enjeux sont importants.
Je tenais beaucoup à ce que la fin soit ouverte et que l'on
puisse l'interpréter en fonction de sa propre nature. C'est
un peu comme ça dans la vie : les choses ne sont pas toujours
carrées. Il n'y a pas eu de casting. Je vois beaucoup de films
et je crois avoir une certaine connaissance des comédiens,
il y en a que je repère comme ça, j'essaie de laisser parler
mon intuition. J'ai contacté Cyrille grâce à une amie, Anna
de Palma, qui avait, à un moment donné, pensé à lui pour un
rôle dans son premier long métrage. Je l'avais vu dans des
films comme La confusion des genres et Oui mais.
Le jour où nous nous sommes rencontrés, je devais lui remettre
le scénario pour lecture et lorsque je l'ai vu entrer dans
le café où nous nous étions donné rendez-vous, avec ce « look »
complètement différent (cheveux plus longs, un peu de barbe)
j'ai eu un choc, je lui ai demandé de ne surtout rien changer
s'il était OK pour le film car c'était parfait pour ce rôle
de routard.
|
|
|
|
Synopsis : C'est
l'hiver. Une femme seule fait monter à bord de sa
voiture un jeune auto-stoppeur. Malgré leurs différences
(âge, langage, bagage), une relation faite de regards,
de sourires, de non-dits s'installe.
|
|
|
|
Titre : Signe d’hiver
Réalisateur : Jean-Claude
Moireau
Scénariste : Jean-Claude
Moireau
Acteurs : Marie
Rousseau, Cyrille Thouvenin, Zouzou
Directeur photographie : Pierre
Stoeber
Ingénieur du son : François
Guillaume
Montage : Camille Cotte
Durée : 35 mn
Pays : France
Année : 2002
|
|
|