Entretien
réalisé
à Paris, le 16 mai 2003
Par Annelise LANDUREAU
D'AMOUR ET D’EAU FRAICHE ...
Après un court-métrage (Les Vacances, en 1997), un
moyen-métrage tout aussi remarqué (La Puce, en 1998),
et un téléfilm mettant une fois de plus en scène son actrice
porte-bonheur : Isild Le Besco, Emmanuelle Bercot réalise
en 2001 son premier long-métrage : Clément (sélectionné
au Festival de Cannes - Un Certain regard) , “une simple histoire
d'amour", comme elle aime simplement à le résumer. Auréolé
du Prix de la Jeunesse, le film attendra deux ans dans les
tiroirs du distributeurs, jusqu'au 4 juin 2003. La réalisatrice
revient sur son premier film, à quelques semaines de sa sortie...
Objectif Cinéma
: Clément
a été présenté à Cannes en 2001. Il est programmé en salles
pour juin, pourquoi autant d'attente ?
Emmanuelle Bercot
: Il y a deux raisons. La première est qu'avant de présenter
le film à Cannes, j'ai été contrainte de couper un certain
nombre de choses dans le film. Ensuite j'ai voulu faire marche
arrière après le festival et puis ça n'a pas été possible.
On est rentré dans un conflit juridique qui a duré un an,
jusqu'à ce que je décide de céder (entre temps le film a été
remonté et raccourci d'un quart d'heure). Ensuite, il a tout
simplement fallu attendre qu'Arte programme le film, puis
le distributeur (qui ne voulait pas le sortir trop vite après
la diffusion à la télévision) a choisi cette date du mois
de juin 2003. Donc voilà : en tout, il s’est écoulé presque
deux ans entre Cannes et la sortie en salles.
Objectif Cinéma
: L'utilisation de la DV,
c'était ton choix personnel ?
Emmanuelle Bercot
: Non pas du tout. A l’origine je voulais faire ce film pour
le cinéma. J'avais rencontré un garçon pour le rôle, et je
voulais faire le film très vite avant qu'il ne change physiquement,
qu’il ne grandisse. A ce moment-là, Arte m'a proposé de faire
un film, au sujet complètement libre, dans la collection "Petites
caméras". J’ai accepté car c'était la seule solution
que j’avais trouvé pour réaliser Clément très vite.
Il se trouve en définitive que je n'ai pas pu le faire avec
le garçon initialement envisagé, et que j'aurais pu le tourner
autrement, mais bon, comme c'est toujours long de monter un
projet...
Objectif Cinéma
: Dans La Puce tu
mets déjà en scène une histoire d'amour entre une jeune
fille et un homme plus âgé ; qu'est-ce qui t'intéresse dans
ce rapport spécifique ?
Emmanuelle Bercot :
Je comprends et je réfute à la fois ce rapprochement entre
La Puce et Clément, la seule similarité étant
l'écart d'âge entre les deux personnages. Pour moi, La
Puce n'est à aucun moment une histoire d'amour : la
fille est troublée, elle a du désir, elle ne sait pas trop
ce qui lui arrive mais je ne pense pas qu'elle soit vraiment
amoureuse de l'homme, alors que Clément, c'est avant
tout une histoire d'amour. Il se trouve qu'ils ont une différence
d'âge, c'est un argument presque scénaristique, mais ce
n'est pas le sujet du film. J’attends des spectateurs qu'ils
oublient cette différence.
Je ne vois pas quelle histoire d'amour j'aurais pu raconter
entre deux personnes du même âge, du même milieu social...
Il y a, d'une manière générale, quelque chose dans la différence
qui m'intéresse : j'aime les situations où, d'emblée, il
y a quelque chose qui grince.