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Objectif Cinéma : Pourquoi avoir fait le choix d'être à la fois devant et derrière la caméra ?

Emmanuelle Bercot : Dans mes films, j’aime bien reconstituer des groupes de gens qui existent déjà dans la vie. Des groupes d'acteurs, des familles... J’avais déjà joué avec ce garçon dans un autre film, on était devenus très amis, et ça me paraissait bien de profiter de cette complicité pour la basculer dans le film.

Et puis, en écrivant le scénario, je trouvais que j'étais bien pour le rôle. Ensuite, j'ai changé d'avis, je voulais prendre quelqu'un d'autre. Mais je ne voulais pas une actrice inconnue, je ne me voyais pas partir pour un an de casting alors que j'avais déjà du mal à trouver le garçon… Et ce n’était même pas la peine d’envisager de le proposer aux actrices connues auxquelles j'avais pensé…


  Clément (c) D.R.

Objectif Cinéma : Tu avais pensé à qui ?

Emmanuelle Bercot : D'abord à Emmanuelle Béart, et puis je me suis dis qu'elle était trop belle, que c'était trop facile parce que tout le monde aurait tout de suite compris qu'un gamin de cet âge tombe amoureux d'une femme comme elle. Ensuite à Sandrine Bonnaire... Mais en dehors des problèmes d'ordre financier que cela aurait représenté, je savais que le sujet poserait problème pour des actrices connues.

D'autre part, au niveau purement artistique de la mise en scène, je pensais que ça pouvait être intéressant pour moi de faire cette expérience, de ne pas être uniquement derrière la caméra, mais d'être dans l'action. Je ne le regrette pas car c'était passionnant. Dans le mode de filmage qu'on avait, j'avais vraiment l'impression d'être libre, ça me permettait d'installer comme une laisse entre la caméra et moi. Ce sont les mouvements de Marion, la façon dont elle bougeait, qui influençaient la caméra...et donc la mise en scène.


Objectif Cinéma : Et d’une manière pratique, comment ça s'est passé ?

Emmanuelle Bercot : Il y a eu deux façons de faire. Dans les intérieurs avec peu de personnages, les choses étaient très formelles : je définissais clairement à l'avance les plans avec la personne qui cadrait. Dans toutes les scènes d'extérieur, de groupe, on ne faisait quasiment pas de répétitions, donc je donnais des consignes assez précises, avec le parti pris de ne jamais faire la même chose. Finalement on a peu respecté cette idée car, comme souvent la première prise ne convenait pas, on en refaisait une un peu similaire... Mais disons qu'au lieu de préparer les choses et puis de les tourner, je les inventais en même temps que la caméra tournait.


La Puce (c) D.R.

Objectif Cinéma : Olivier Guéritée, qui interprète Clément, n'était donc pas l'acteur prévu initialement ?

Emmanuelle Bercot : Non. Le garçon auquel je pensais n'a finalement pas reçu l'agrément de la D.A.S.S., donc je me suis retrouvé à lancer un casting qui a duré presque un an, ce qui a encore décalé le tournage, et au moment où j'allais décider d'abandonner le projet, je l'ai trouvé.... C'était un gamin que j'avais déjà vu mais qui ne m'avait pas convaincu totalement, donc il est revenu, je l'ai fait travailler et puis finalement j'ai décidé de le faire avec lui.


Objectif Cinéma : Il évoque un peu la fragilité mêlée d'assurance de l'Antoine Doinel des Quatre cents coups...

Emmanuelle Bercot : Oui, on m'a déjà dit ça. Il est moins brute peut-être... C'est ce qu'il a dégagé dans les essais qui m'a touchée : cette espèce de fragilité, de féminité aussi, et un côté très provocateur. Très sûr de lui, très conscient de son pouvoir de séduction, ce qu'on voit rarement chez des garçons de cet âge, qui sont généralement plus maladroits. Lui pas du tout, et assez dominant quand même, avec un autre côté fragile et émouvant...