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Objectif Cinéma
: On a l'impression d'un
grand naturel dans la plupart des scènes. Etaient-elles
toutes écrites ou as-tu laissé place à l'improvisation,
notamment dans les scènes avec les autres enfants, comme
la scène des règles ?
Emmanuelle Bercot
: Cette scène est la seule improvisée. Elle était écrite
sans dialogues. Ils ont dit des trucs que je n’aurais pas
pu écrire. En plus, ils allaient dans la surenchère... Par
exemple, quand ils disent que les filles "bandent pas
par les seins", je n’aurais pas pu l’inventer !
Objectif Cinéma
: Le film s'ouvre sur une
scène d'amour très sensuelle, charnelle, adulte... puis
Marion est peu à peu mise du côté des enfants, elle paraît
très vite assez inadaptée pour les personnes de son âge,
immature. Finalement, c'est paradoxalement elle qui va peut-être
le plus sortir "grandie" de cette histoire avec
cet adolescent...
Emmanuelle Bercot
: Oui, absolument. Clément, à la limite, est déjà plus grand
qu'elle, dès le début du film. Il a beaucoup plus vite conscience
des limites de leur histoire alors qu'elle refuse de les
voir. On comprend qu'elle est photographe, qu'elle a quand
même une vie sociale, mais elle est tiraillée entre sa place
d'adulte, dans laquelle on s'aperçoit qu'elle est mal à
l'aise, et puis quelque chose de plus adolescent. Il y a
une marche qu'elle n'a pas franchie et qu'elle franchit
douloureusement à la fin du film.
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Objectif Cinéma
: Finalement, c'est ce
qu'on pourrait appeler un film d'initiation, comme les
romans, mais pris à contre-pied puisqu'il s'agit d'une
adulte...
Emmanuelle Bercot
: Exactement. Pour moi ce n'est pas du tout l'histoire
d'un gamin qui se fait initier par une femme plus âgée.
Objectif Cinéma
: Leur histoire est clairement
placée dans un univers aquatique (les jeux d'eau du début
de la rencontre, la piscine où Clément l'enlace puis les
week-ends à la mer et enfin les vagues dans lesquelles
elle se jette, désespérée). L'eau a elle une symbolique
particulière ?
Emmanuelle Bercot
: Sûrement, mais pas de manière consciente. Moi, j'adore
filmer des choses qui ont rapport à l'eau. D' autre part,
la scène de la piscine ne pouvait exister que dans l'eau.
C'est un élément très trouble, qui permet une sensualité
particulière... C'est un élément liant. En fait, si on
m'avait dit que je ne pouvais pas faire cette scène dans
la piscine, je ne sais pas comment j'aurais fait : je
ne voyais pas cette scène autrement. Et c'est vrai que
la présence de la mer à la fin, le premier baiser sur
la plage où on entend les vagues au loin, tout cela apporte
une dimension à la fois sensuelle et lyrique que j'aime
beaucoup.
Objectif Cinéma
: Communément l'eau est
le symbole de la maternité, on pense au liquide amniotique...
On pourrait penser que comme c'est un personnage qui ne
veut pas grandir...
Emmanuelle Bercot
: Je n'y avais pas pensé mais il y a sûrement un rapport.
C'est drôle, j'en apprends toujours beaucoup sur mes films
en lisant ce qu'écrivent les gens.