|
 |
|
|
Objectif Cinéma :
C’est drôle, parce que vu
l’histoire, on pourrait s’attendre à des espaces confinés
parcourus par une caméra constamment en mouvement. Pourtant
ce ne sera pas filmé caméra à l’épaule…
Serge Bozon : Non,
non vraiment, si je devais avoir un modèle, ce serait les
films de Samuel Fuller dont je vous ai parlé. Ce sera une
petite troupe itinérante… un film assez violent, non seulement
avec des morts, des coups de fusils mais également dans les
rapports que la femme entretiendra avec les autres personnages.
Il y aura assez peu de dialogues, ce sera moins littéraire,
mais plus contemplatif.
Pour moi, le plus beau film de guerre de tous les temps, c’est
Objective, Burma ! de Raoul Walsh : on suit
une troupe qui doit simplement aller d’un point à un autre,
on les suit beaucoup la nuit, c’est somptueux. J’aimerais
que mon film soit contemplatif dans ce sens-là. En revanche,
il y aura aussi des ruptures de ton, des choses drôles dans
le film. Je pense que Johan, le garçon asiatique qui joue
dans Mods, et Benjamin Esdraffo, seront dans le film.
Je les vois bien être deux soldats assez méchants, assez désagréables,
qui ne parlent qu’entre eux, en jouant peut-être sur cette
voix qui part dans les aigus. Mais bon, on en est seulement
à l’étape d’ébauche, rien n’est encore fait.
Objectif Cinéma :
Votre film fait aussi penser à une stylisation de l’univers
de Truffaut, ou à Eustache pour ce goût de l’aphorisme et
de l’anti-naturalisme.
Serge Bozon : J’aime
beaucoup Truffaut, j’ai écrit mon premier article sur Truffaut
dans la revue Trafic. Mais je n’y pense plus trop.
Les films les plus romanesques de Truffaut sont ceux que je
préfère, j’adore Les deux Anglaises et le continent,
La chambre verte. J’aime beaucoup Baisers volés
qui n’est pas un film romanesque mais que je trouve parfait
dans son style. Eustache, j’aime tous ses films ; mais
Eustache, par rapport aux autres cinéastes que je citais tout
à l’heure, est plus centré sur deux ou trois personnages alors
que dans mon film, il n’y a pas vraiment d’histoire, pas de
passage à l’acte, il y a plutôt une multitude de petits centres,
des loufoqueries, des répétitions, peu de choses qui soient
immédiatement sentimentales, c’est plus proche de Biette et
de Pierre Zucca.
 |
|
|
|
Objectif Cinéma :
Comment vous situez-vous par
rapport à un cinéaste comme Arnaud Desplechin qui lui
aussi s’intéresse beaucoup à Truffaut et au romanesque ?
Serge Bozon : C’est
quelqu’un que j’ai connu à Trafic. C’est un cinéma
moins bricolé, moins sauvage que le mien. Ça a une ambition
différente, de grande forme. J’aime davantage les films un
peu bizarres.
Objectif Cinéma :
Et Philippe Katerine… ?
Serge Bozon :
J’aime beaucoup aussi. Dans Un homme un vrai, le film
des frères Larrieu, la dernière chanson est remarquable. En
revanche, Katerine est plus dans un registre bossa nova
de désir flottant. J’aurais bien aimé qu’il voie Mods.
 |
|
2002
Mods avec Laurent Lacotte, Guillaume
Verdier
1998
L'Amitié avec Eva Truffaut, Serge Bozon
|
|