Objectif Cinéma : Il
y a assez peu de films qui utilisent véritablement des chansons
rocks dans leur intégralité.
Serge Bozon :En
France, un cinéaste comme F.J. Ossang a utilisé de manière assez
intéressante de la musique punk ou indus de la
fin des années 70. Aux Etats-Unis, début quatre-vingt, il y
a eu aussi ce film avec les Ramones, Rock’n roll highschool.
On me pose souvent la question, mais il y a assez peu d’exemples
de films dans lesquels j’ai vraiment aimé l’utilisation d’une
musique rock prenant une place importante.
Objectif Cinéma : Velvet
Goldmine de Todd Haynes ?
Serge Bozon :Oui
bien sûr, mais là c’est vraiment un film sur un courant musical,
on ne peut pas faire autrement. Mon film ne traite pas d’un
courant musical, aucun de mes personnages ne joue de la musique.
On ne les voit pas répéter. A partir du moment où l’on fait
un film sur le glam-rock, on est obligé d’en entendre ;
je dirai que c’est presque une utilisation passive de la musique.
Je parlais des films où l’on ne voit pas de musiciens.
Objectif Cinéma : Gouttes d’eau sur pierres brûlantes de François
Ozon?
Serge Bozon :Je
ne l’ai pas vu. C’était quoi comme musique, c’était pas du rock ?
Objectif Cinéma :
Non. Une sorte d’easy-listening
allemand des années soixante-dix. Un truc très ludique.
L’utilisation centrale de la musique dans Mods, c’est
quelque chose de ponctuel ?
Serge Bozon :Oui, c’est ponctuel. Au départ, ça
s’est imposé pour le film du point de vue de la scénariste,
mais il n’y aura pas de rock dans mon prochain film. Après
Mods, je ne compte pas faire Punks ou Skins,
même si, pour un film, j’aurai adoré utiliser ce qu’on appelle
la Nothern soul, la « soul obscure » des
années soixante, c’est une musique moins sèche et moins
rugueuse que le « garage ». Mais d’un point de
vue capillaire, les skins, c’est beaucoup moins beau
à filmer que les mods.
Je précise que les skinheads n’ont rien à voir avec
les « baldheads ». Les skins, au départ,
ne sont pas liés avec l’extrême droite ; en fait c’est
la suite du mouvement mods. En 1967, quand certains
mods sont devenus psychédéliques, d’autres mods
dans le nord de l’Angleterre se sont intéressés à la musique
soul. Ils se sont rasé les cheveux par opposition
aux mods psychédéliques qui se laissaient pousser
les cheveux. Ils se sont ensuite intéressés au ska,
et ont fondé le mouvement skinhead. Il y avait beaucoup
de Jamaïcains en Angleterre et, lors des manifestations,
la police montée les attrapait par les cheveux. C’est aussi
pour cela qu’ils se sont rasé la tête. C’est seulement à
la fin des années 70, à la suite du mouvement punk,
qu’un courant d’extrême droite a récupéré ce look, on les
appelait les « baldheads ».
Objectif Cinéma : Quels
sont les projets sur lesquels vous travaillez actuellement ?
Serge Bozon :C’est censé être un film de guerre.
Cela se passe pendant 1914-1918, c’est l’histoire d’une
femme qui tente de retrouver son mari qui l’a quittée et
qui va se retrouver dans une petite patrouille itinérante.
Ce sera un peu dans le style de Fixed Bayonets et
Steel Helmet.