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Pas sur la bouche (c) D.R. JACQUES SAULNIER
Chef décorateur
Entretien réalisée
le 2 avril 2003
Par Alexandre TSEKENIS


En cinq décennies, le nom de Jacques Saulnier a été associé aux décors de quelques cent vingt films - en comptant ceux comme assistant de Max Douy ou Alexandre Trauner.

Débutant avec le cinéma noir et blanc des années cinquante, c’est dans le sillon de la Nouvelle Vague qu’il deviendra chef décorateur, travaillant par la suite avec de nombreux réalisateurs, notamment Henri Verneuil et Pierre Granier-Deferre.

Déclarant volontiers : « Mon métier, c’est avant tout le studio », Jacques Saulnier défend sa conception du décor à travers une longue collaboration avec Alain Resnais. Une collaboration toujours d’actualité avec Pas sur la bouche, tourné au printemps 2003 sur les plateaux d’Arpajon.


  Pas sur la bouche (c) D.R.

Objectif Cinéma : Qu’est-ce qui vous a conduit à étudier le décor de cinéma ?

Jacques Saulnier : Ma motivation était l’architecture. Au début des années 50, alors que je préparais l’entrée aux Beaux-arts (section architecture), je me suis présenté également à l’IDHEC, ce qui était quelque peu osé de ma part. Les épreuves d’admission avaient lieu aux mêmes dates, le matin j’étais à l’IDHEC, l’après-midi aux Beaux-arts.  Les programmes étaient très similaires, avec une épreuve en plus sur le cinéma à l’IDHEC. Pour moi, c’était assez facile car j’étais cinéphile et m’occupais du Ciné-Club Universitaire. Il y avait quand même 3 ou 4 séances par semaines et j’y ai vu beaucoup de films français et américains.

J’ai été reçu seulement à l’IDHEC. L’architecture est un peut-être un métier plus sérieux, mais il y a tellement peu d’architectes qui peuvent travailler raisonnablement, à cause des contraintes financières ou politiques. Finalement, je ne regrette pas d’avoir choisi le cinéma. La section décor de l’école était dirigée par Hugues Laurent, nous étions trois étudiants dans ma promotion : François de Lamothe (1), André Guérin et moi-même. On était capable de dessiner un escalier en colimaçon 1900, une porte moulurée, le détail d’un meuble art-déco. Ce n’est plus ce qu’on enseigne ni aux Beaux-arts, ni à La fémis, mais sans doute encore à l’Ecole Boule.


Objectif Cinéma
 : En dehors de l’IDHEC, d’où venaient les décorateurs de cinéma de l’époque ?

Jacques Saulnier : Certains, comme Max Douy, avaient appris sur le tas. Il y avait des architectes diplômés comme Lucien Aguettand, d’autres qui avaient fait peinture, ou diverses écoles de dessin. Il y avait aussi des anciens assistants de Trauner, et ce fut également mon cas, j’en suis toujours assez fier. J’ai été assistant pendant une dizaine d’années pour Trauner, Douy, Jean André et Jacques Colombier. J’ai essayé de prendre les qualités de chacun, et d’éviter leurs défauts -ce qui ne m’empêche pas d’avoir mes propres défauts, bien sur.

Cette période d’assistanat est nécessaire, car on n’apprend pas tout dans les écoles. Ça manque aux jeunes décorateurs. Aujourd’hui, ils ont envie de démarrer très vite. Personnellement, je n’étais pas pressé de travailler seul, j’avais l’impression qu’il fallait savoir tellement de choses. A chaque film, on s’attaque à un sujet différent qu’on connaît peu, et c’est ce qui est passionnant.