Entretien
réalisé à Paris,
le 8 novembre 2003
Par Nicolas JOURNET
Paris, jour de pluie. Appartement
de Devrim Alpöge. Affiche de Mon Oncle sur un mur,
chaise de cinéaste dans le salon, et le long du hall d'entrée
une gigantesque étagère où sont classés près de 1700 films
en cassettes ou DVD, l'ambiance est cinéphile. Journaliste
de profession pour des journaux turcs et à RFI, Devrim Alpöge
est aussi le réalisateur de trois films expérimentaux. Le
dernier, Et le corps fut, a sillonné les festivals
européens et obtenu le prix du meilleur film expérimental
au festival du film de Girone. Rien que de très mérité, vu
le travail accompli par ce trentenaire pour rompre avec les
essais théseux et redonner à l'expérimental une dimension
autre que masturbatoire.
Objectif Cinéma
: Pourquoi avoir vous êtes-vous
lancé dans le cinéma ?
Devrim Alpöge : Ce n'est
pas ma faute ! Mon père a fait du théâtre dans sa jeunesse,
ce doit être lui qui m'a transmis le virus. Quand j'avais
six ou sept ans, il m'a confié une caméra 8 millimètres
achetée aux États-Unis. J'utilisais de la pellicule doublée
: je pouvais faire des petits fictions de trois minutes
sans bande sonore. Les sujets étaient très différents, surtout
des petites histoires autour de ma vie familiale comme une
scène de pique-nique par exemple. Mon père et mon oncle
jouaient les rôles principaux. Il n'y a donc rien de bien
étonnant à ce que je me lance un jour dans le cinéma !
Objectif Cinéma : Pourtant,
vous n'avez pas opté tout de suite pour le septième Art
?
Devrim Alpöge : Mes parents
se sont installés en France quand j'avais 12-13 ans. Après
le lycée, j'ai décidé de ne pas faire une école de cinéma.
Peut-être influencé par l'éducation que j'avais reçue, je
considérais qu'on ne pouvait pas gagner sa vie avec le cinéma
et qu'il fallait donc faire un autre métier. Rétrospectivement,
je trouve cela un peu immature. Aujourd'hui, je me rends
compte que ne pas avoir fait une école de cinéma est quelque
chose qui me fait défaut. Je manque cruellement de contacts
dans le métier. Je n'ai pas cet entourage qui se crée dans
une école, alors que le relationnel est primordial dans
le cinéma.