Objectif Cinéma : J’aimerai
que vous me parliez de la scène du piercing, il y règne une
sorte de perversité latente …
Peter Webber :
Oui, c’est ma scène préférée, c’est normal. Je suis anglais,
c’est ce qu’on appelle le « vice anglais »… (rires)
Objectif Cinéma :
Quelle pourrait être selon vous l’importance
de cette scène, par rapport à l’intrigue et par extension par
rapport à ce qu’on a l’habitude de voir au cinéma ?
Peter Webber :
Je ne pense pas être à la bonne place pour en parler, faisant
partie de la « matière » même du film. Mais à un certain
degré, bien sûr c’est la métaphore du dépucelage. Je crois que
cela montre que la seule façon que ces deux êtres ont de communiquer
et de vivre leur relation, c’est à travers la douleur, douleur
qu’elle accepte car tous deux se sentent investis d’une mission
qui est de participer à l’œuvre et de la créer. Je crois donc
intimement que la douleur émotionnelle et la sexualité se mélangent
et c’est un courant un peu à la fois pervers, et un peu sombre
et fascinant qui est présent dans tout le film. Je ne sais pas
ce que cela veut dire par rapport à ma personnalité (rires),
mais en tout cas, j’ai voulu faire ce film à cause de cette
scène. C’est vraiment cette scène qui a débloqué le film !
Vous me demandiez ce que cette scène pouvait amener dans le
cinéma contemporain, je ne veux pas trop en dire, mais il y
a dans cette scène quelque chose d’inédit, comme une « force
primale ».
Objectif Cinéma : Et
celui qui incarne le plus ce mystère, c’est bien le personnage
de Vermeer (joué par Colin Firth). Comment avez-vous travaillé
sur cet aspect du rôle avec Colin Firth ?
Peter Webber :
J’ai pu travailler avec un acteur qui aime le minimalisme, -
si je puis dire - du jeu et qui acceptait d’être cette espèce
de présent fantomatique. Il n’était pas égoïste ou plutôt égotiste
au point de vouloir s’imposer, car finalement tout le travail
de Colin, là-dedans était de créer à la fois le mystère et l’ombre,
la présence et l’absence.
Objectif Cinéma :
En somme, garder ce mystère présent
autour de Vermeer (personnage dont les détails biographiques
restent confus pour les spécialistes de l’histoire de l’art),
tout au long du film, n’était-ce pas surtout une forme d’hommage
à ce génie de la peinture flamande ?
Peter Webber :
Tout à fait. Dans les tableaux de Vermeer, il y a toujours cette
forme de transcendance qui crée ce sentiment même de mystère.
Ma ligne directive, finalement, c’était de capturer l’essence
de sa magie, de travailler avec ce « filtre Vermeer »
qui me poussait à couper, couper et toujours couper, pour atteindre
l’essentiel, l’essence même de son art.
2004La Fille à la Perle (premier long métrage) 2002The Stretford wives (TV) 2001Men only (TV) 1999Underground (2001) 1997The Temptation of Franz Schubert