FREDERIC
COMTET Distributeur et créateur de festival
Entretien
réalisé
le 13 juillet 2004
Par Cécile GIRAUD
Après avoir travaillé dans le marketing,
Frédéric Comtet s’est lancé il y a trois ans dans l’aventure
d’un festival qui se développe peu à peu : le festival
Nouvelle Génération de Lyon, dédié au cinéma numérique. Après
ce challenge réussi, il se lance dans un nouveau défi, celui
de la distribution avec sa société « You’re Talking to
me », en choisissant un premier film, véritable phénomène
critique mais risque public : Tarnation de Jonathan
Caouette. Tarnation, c’est 20 ans d’images coupées, collées,
et formant finalement un film d’1h30, entre documentaire, fiction
et expérimental, un film attachant, dur, et émouvant mais surtout
expérience visuelle qui rend public ce qui relevait jusqu’à
maintenant de la sphère underground. Il nous raconte sa rencontre
avec Tarnation et le numérique.
Objectif Cinéma : Pourquoi
vous intéressez-vous au cinéma numérique ?
Frédéric Comtet :Je m’intéresse au cinéma numérique,
que j’appelle nouvelle génération, dans sa dimension économique
et esthétique : à savoir apporte-t-il quelque chose de
nouveau dans le cinéma ? Le numérique est la solution
pour se désenclaver de la pression des producteurs de cinéma,
c’est-à-dire des chaînes de télévision, dont les objectifs
sont antinomiques avec la liberté de création. L’objectif
d’audience ne correspond pas à l’objectif de ceux qui font
du cinéma. Le numérique est une vraie alternative économique
qui devient un mouvement artistique. De plus en plus de films
intéressants apparaissent et ne pourraient pas exister autrement,
comme Tarnation, de par notamment tous les éléments
dont il se sert (super 8, vidéo, photos…). Avec un logiciel
de montage comme « I Movie », tout est très facile
à monter. Le potentiel de création devient plus important,
on le voit avec le festival à Lyon et sa troisième édition
qui a eu lieu cette année. Il y a une vraie évolution du contenu,
de plus en plus de films intéressants, surtout à l’étranger,
dans les pays qui n’ont pas les moyens de produire des films,
comme l’Afrique.
Le cinéma renaît grâce au numérique. C’est un cinéma plus
audacieux, plus créatif, plus libre que le cinéma traditionnel.
Mais il y a encore un frein à la diffusion des films :
peu de salles sont équipées en numérique, il faut les convaincre
de s’équiper, leur prouver que la qualité de l’image peut
être égale au film classique. Mais il y a aussi un frein qui
est lié à l’économie du cinéma. Les circuits de salles appartiennent
à de grosses sociétés qui n’ont pas forcément intérêt à s’équiper
en numérique. Aujourd’hui, il faut kinéscoper les films en
numérique pour les mettre en 35 mm, tirer des copies, ce qui
est très coûteux, alors que le support numérique est par essence
peu coûteux.