Objectif cinéma :
Cela implique de changer de modèle économique.
Vincent Dieutre :En plus ça correspond évidemment à
un questionnement économique du cinéma. Il y a aujourd’hui
un rapport prix du film / efficacité dramatique du film qui
est incommensurable par rapport à des films qui coûtent 20
à 30 fois plus cher et qui ne vont pas toucher autant. L’impact
de ce qu’on fait quand on se prend comme « victime »,
objet, est très fort. Quand on parle directement d’une expérience
de soi au spectateur, on instaure un contact très direct.
Le cinéma d’auteur des années 70, 80, a complètement explosé.
Même le film d’Henri François Imbert qui n’est que du banc-titre
et un peu de super 8 bouleverse des gens, et des gens très
simples, parce que ce sont des dispositifs très forts. Le
fait que ça arrive dans ce système très codifié évidemment
ça crée une crise de légitimité. C’est pour ça qu’on a crée
Point ligne plan, la lettre du cinéma, pour se retrouver un
peu.
Objectif cinéma :L’inadéquation existant entre ce cinéma
et le système économique sur lequel repose le cinéma dit classique,
implique aussi de recourir à d’autres moyens de distribution.
Pensez-vous lorsque vous tournez à d’autres lieux ou dispositifs
de présentation que les salles de cinéma.
Vincent Dieutre :
Absolument. Mais je ne crois pas qu’il y ait une inadéquation.
L’inadéquation est construite par le marché. Je suis pas du
tout un fétichiste de la salle. Je suis ravi que le Voyage
d’hiver sorte en salle puisque je l’ai pensé pour la salle.
Mais je sais qu’à la longue la salle n’est qu’une donnée du
problème. Aujourd’hui c’est un état de fait, même pour les
films hollywoodiens, n’importe quel de ces films est financés
sur les DVD, la TV et les produits dérivés. Le seul problème
à présent, c’est d’entériner cette situation. Prenez par exemple
Bologna centrale, il a coûté à peu prés 2000 euros
mais il faut 10 fois plus pour qu’il sorte en salle. C’est
absurde, presque marxiste. Mais je ne m’arrêterai pas à ça,
s’il ne sort pas en salle, je le montrerai dans les festivals,
les galeries, les projections exceptionnelles, etc. Tous ces
canaux de distribution existent déjà. C’est vrai aussi que
l’idée de festival fonctionne aussi très bien.
Pour en revenir au dispositif d’installation.
Je disais par exemple à Pierre Huyghe d’essayer de mettre
en présence ses différentes images dans la durée. À propos
de Leçon de ténèbres, je pense que c’est Jean-Michel
Frodon qui disait que c’était déjà un peu installation, qu’il
y avait la mise en présence d’images et de rythmes différents
au sein du film. Ces films pourraient tous depuis le début
donner lieu à des installations. Mon idée c’est qu’il y a
plusieurs couches du film qui sont là en permanence, ce qui
fait qu’on peut passer de l’une à l’autre. C’est en ce sens
qu’on peut parler de dispositif, moins d’installation que
de dispositifs.
2003 Mon voyage d'hiver avec Vincent Dieutre,
Itvan Kebadian 2001 Bonne Nouvelle
(Doc) 2000 Leçons de ténèbres
avec Andrzej Burzynski, Hubert Geiger 1995 Rome désolée de
Vincent Dieutre 1989 The Charm of Confusion
(Doc) 1986 Arrière saison
(Cm) 1985 Londres, janvier
1985 (Doc)