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Cependant, une frustration
est engendrée par le déséquilibre narratif
qui rend le film totalement inégal. Le début
part sur les chapeaux de roue, qu’on aime les filles ou les
garçons, on en a pour son grade : le sublimissime
Brad Renfro se déshabille dans une scène torride :
un concours de jeunes mecs se trémoussant dans une
boîte de nuit aux mœurs louches, un bonheur de lubricité.
A cela s’ajoute l’ambiguïté du rapport entre les
deux garçons principaux, Marty et Bobby. Une véritable
mine d’or scénaristique complètement évaporée
par la suite qui s’offrait pourtant comme une évidence.
Bobby, prisonnier d’un système familial strict et d’un
père trop exigeant ne peut assouvir ses pulsions envers
Marty qu’en le rabaissant, exerçant ainsi un rapport
de dominant, quasi sexuel, signifié par le contact
physique, quand bien même il s’agit de violence. La
scène du night-club, justement, est plus que révélatrice,
c’est Bobby qui insiste pour voir Marty se déshabiller
et la caméra adopte clairement son point de vue, se
perdant entre ces corps surexposés qu’il n’ose admirer.
Comment des pistes aussi claires ont pu être lancées
pour être abandonnées par la suite ?
Puis ce sont les vidéos
gays, le rapport si étrange de Bobby à la sexualité
qui vient alimenter ce constat. Evidemment que si Marty veut
le tuer c’est aussi parce qu’il sait que Bobby le désire
sexuellement et qu’il ne peut le surmonter autrement. La piste
à suivre était claire et le meurtre aurait été
bien plus fort présenté sous cet angle.
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La vraie question reste
comment cette problématique ébauchée
pendant presque une quarantaine de minutes peut complètement
passer à la trappe ensuite ? Car c’est bien deux
film et deux histoires qui cohabitent difficilement dans Bully,
la première étant abandonnée au profit
de la seconde, déséquilibrant ainsi l’ensemble.
C’est peut-être là tout le problème de
Larry Clark : n’étant pas scénariste, il
est sans doute plus intéressé par la façon
dont il va filmer les corps de ses jeunes acteurs que de gérer
la cohérence d’un scénario coincé entre
la reconstitution d’un fait réel et le désir
de raconter une toute autre histoire, celle de Marty et Bobby,
des mœurs particulières d’une génération
sacrifiée, pourrait-on dire, même si le terme
est galvaudé.
Reste le plaisir graphique
de la danse des corps, de ces jeunes à la fois innocents
et vulgaires, victimes et bourreaux, attirants et écœurants,
le réalisateur ayant la pudeur de ne pas trancher,
de laisser libre cours au jugement du spectateur (lui laissant
ainsi sa liberté, c’est suffisamment rare pour le souligner),
appelant aussi à l’indulgence, préservant l’ambiguïté
idéologique perdue dans une histoire peut-être
trop balisée pour qu’en résulte une véritable
subversion…
Bonus :
une bande-annonce, des filmographies, un documentaire
d’une heure sur le fait-divers à l’origine du film
et un making-of. Dommage qu’il n’y ait pas de commentaires
audio du réalisateur.
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Titre :
Bully
Réalisation :
Larry Clark
Acteurs : Brad
Renfro , Bijou Phillips , Nick Stahl , Rachel
Miner , Michael Pitt , Kelli Garner , Leo Fitzpatrick
Editeur : Studio
Canal
Public : interdit
aux moins de 16 ans
Qualité :
Stéréo, couleur
Durée : 108 minutes
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