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I am Josh Polonski's brother (c) D.R. DVD

I’m Josh Polonski's brother
de Raphaël Nadjari
Par Marc LEPOIVRE


Synopsis : Les trois frères Polonski, Ben, Abe et Josh, travaillent ensemble dans leur magasin de tissus du Lower East Side à New York. Leur vie est bouleversée lorsque Josh est brutalement abattu dans la rue devant Abe. Déterminé à élucider le mystère de la mort de son frère, Abe pénètre dans le New York trouble et malfamé que Josh fréquentait. La rencontre avec Jill, une call-girl, la présence oppressive de la famille, le conflit grandissant avec le frère aîné, les relations distantes avec sa femme, déclenchent chez Abe un désir de fuir ce monde trop étroit.


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LA FORCE DE LA FRAGILITE

  I am Josh Polonski's brother (c) D.R.
I’m Josh Polonski’s Brother, de Raphaël Nadjari fait partie des films qui posent l’éternel problème de la forme et du fond. Le film a été en effet entièrement tourné en super 8 et gonflé en 35 mm. Au-delà des raisons économiques, c’est un choix esthétique fort, audacieux, voire provocant. Un choix volontairement à contre-courant puisque le spectateur s’attendrait plutôt au format DV. Mais également à contre courant des normes cinématographiques en usage puisque le super 8 n’est pas un format professionnel de tournage. Comme si Nadjari, d’une part voulait témoigner d’une foi dans le cinéma, dans le pouvoir et le statut originel de l’image cinématographique (la pellicule contre la vidéo), et d’autre part voulait garder un coté expérimental et amateur.

La pertinence de la forme cinématographique semble se justifier selon un axe bien particulier, revendiqué par le cinéaste lui-même : l’axe de la fragilité. I’m Josh Polonski’s brother est en effet un objet fragile en terme d’image, en terme de production, de récit (commencé sans scénario ni dialogue) qui épouse la fragilité même du personnage et de son regard. Comme dans The Shade, l’histoire s’enracine fortement dans New York, ici le quartier, animé et bigarré, du Lower East Side. Les frères Polonski tiennent un magasin de tissus jusqu’au jour où Josh est abattu dans la rue. Abe, personnage naïf et fragile, entreprend une enquête sur la mort de son frère qui l’emmène dans les lieux troubles et interlopes de la ville, l’envers obscur de la cité. Evidemment, la structure légère de tournage permet de suivre cette logique déambulatoire, errante du héros, c’est-à-dire de capter les pulsations et l’énergie de la ville, d’adopter un état de réceptivité et de disponibilité face aux multiples signes, stimuli, événements, produits par cette fascinante et monstrueuse cité. L’absence de scénario entraîne le cinéma de Nadjari sur une pente documentariste. Comme si la ville elle-même devait engendrer l’histoire qu’on raconte. Bien souvent le spectateur se dit que l’intrigue n’est qu’un prétexte. De fait, elle contraste fortement avec celle de The Shade, plus structurée, basée sur un canevas littéraire (une nouvelle de Dostoievski) mais aussi plus forte, plus tendue, plus originale. Cependant, on retrouve dans ce dernier film une thématique dostoïevskienne à travers le fort sentiment de culpabilité du héros, accentué par le poids de la religion juive du milieu familial, son caractère autodestructeur. A ce sujet, il convient de souligner la magnifique interprétation de Richard Edson, rendant sensible la naïveté, la maladresse de son personnage, lui donnant la dimension innocente d’un enfant. Par ailleurs, notons le personnage complexe et inquiétant de Ben, le frère aîné (Jeff Ware), prototype du personnage qui à force de vouloir le bien fait le mal, et exerce une autorité morale tyrannique sur la famille (et sur Abe), sorte de sur-moi religieux, figure paternelle et castratrice type.