Annuaire boutique
Librairie Lis-Voir
PriceMinister
Amazon
Fnac

     


 

 

 

 

 
Mais ou et don ornicar (c) D.R. DVD

Mais où et donc ornicar
de Bertrand van Effenterre
Par Bernard PAYEN


Synopsis : Ils ont 30 ans, ont des enfants, des appartements, des métiers, des voitures et encore des amours. Au hasard des feux de la ville, ils vont se croiser et se décroiser.


....................................................................

  Mais ou et don ornicar (c) D.R.

" Mais ou et donc ornicar ", une expression ludique qui ramène à l’enfance écolière, un procédé mnémotechnique pour se rappeler des sept conjonctions de coordination. Mais ou et donc ornicar, c’est aussi un long métrage de cinéma qui se rattache à l’enfance, celle qui ne nous quitte jamais, à trente ou soixante ans passés. Les bouts de vie des personnages qui s’y entrecroisent paraissent anodins alors qu’ils sont extra-ordinaires (car ils renvoient à chacune de nous).

Prenons d’abord Isabelle (Géraldine Chaplin), une sociologue interviewant des femmes d’âges et de profils différents vivant dans un même immeuble. Parmi elles se détache la figure d’Anne (Brigitte Fossey), nouvellement promue chef d’atelier dans un garage. Son mari Michel est technicien forestier. Il travaille notamment avec son meilleur ami, Vincent (Jean-Jacques Biraud).

Ne cherchez donc pas une histoire dans Mais ou et donc ornicar, mais DES histoires, s’entrelaçant et révélant progressivement les caractères de chacun, leur peurs, leurs rêves, leurs aspirations. Le film est entièrement construit à l’image de son expression-titre, tous les personnages devenant presque le coordinateur de l’autre. C’est un film-volcan qui ne déclarerait jamais son éruption mais dont on sentirait le grondement en permanence derrière les plans, véritables plaques tectoniques des sentiments. Mais ou et donc ornicar est un film sur la trentaine discrète, la fragilisation des êtres pris en tenaille entre le souvenir prégnant de l’adolescence insouciante et les responsabilités adultes. Isabelle, Anne, Michel, Vincent, Philippe sont filmés dans l’éclaircissement de leurs prises de conscience respectives.

Mais ou et don ornicar (c) D.R.

Peut-on vivre seule avec son enfant même si on est toujours amoureuse de son compagnon ? Peut-on concilier vie professionnelle (qui plus est quand on est une femme travaillant dans un univers automobile peuplé de machos ironiques) et vie familiale ? Peut-on justement accepter (quand on est un homme) de se laisser délaisser par femmes et enfants, plombé par l’incertitude et la remise en cause de ses propres idéaux ? Ces quelques questions posées ont certes perdu de leur singularité aujourd’hui, mais elles étaient assez neuves en 1978, quand le film est sorti en salles. Elles sont néanmoins toujours d’actualité. Et c’est précisément la permanence mélancolique de ces interrogations qui rend le film profondément émouvant. A l’image de cette séquence où Isabelle, après une nuit d’amour adolescente avec Philippe, le compagnon dont elle ne veut finalement se défaire, remet en cause son travail de sociologue et se révèle à elle-même : " tous ces visages que je scrute (…) je crois que c’est moi qui parle, qui leur supplie de me rendre mon passé, mon enfance, ma vie qu’on ne m’a pas permis de trouver…je crois que c’est moi qui appelle à l’aide dans ce voyage. Tu sais, Philippe, c’est difficile de garder l’espoir. " Plus tard, la jeune femme se prend pour propre sujet et fait cet aveu déchirant : " j’échoue à communiquer, à comprendre, à aimer et me faire aimer…à chaque échec je ressens plus profondément la solitude ".

La solitude. Et si on tenait là le sujet principal de Mais ou et donc ornicar ? Le film semble faire écho à cette parole de Léo Ferré : " On naît seul, on meurt seul ". Comme le suicide de cette femme enceinte à qui personne ne parlait, et qu’on apprend dans un détour du film.