Passe passe passera la dernière la dernière…
Printemps 1990, Noël Simsolo publie un
ouvrage sur Clint Eastwwod, sobrement intitulé « Clint
Eastwood » dans la collection Auteur des Cahiers
du Cinéma. La couverture bleue présentait une image, un
plan en noir et blanc extrait d’un film en couleur (The Gauntlet)
cadré sur le visage du comédien-réalisateur. La couverture
s’exposait formellement comme une pensée du cinéma. Que dire
de celle de cet automne 2003 où nous retrouvons Simsolo aux
commandes d’une réédition augmentée des films réalisés durant
ces 13 ans, si ce n’est que le cinéma dans ce qu’il comprend
de photogénie a laissé place à une couverture « très magazine »
dans ce flou « artistique » Nous retrouvons le visage
de Clint, mais ici dans le hors-champ du cinéma. C’est le réalisateur
que nous avons, avec les écouteurs abaissés, et qui semble nous
regarder, du noir profond de la couverture (de l’écran éteint ?),
nous public invisible et absent. Cette obscurité serait ce clin
d’œil du critique de cinéma, amateur de jazz comme le cinéaste,
au noir eastwoodien, véritable palette qui joue l’effet-signe
des films dits crépusculaires (à partir Unforgiven 1992).
Ce qui peut nous intéresser c’est de réaliser que cette 1er
couverture nous présente non plus l’œuvre (le plan d’un film)
mais le réalisateur, cet homme de chair semblant sortir, émerger
des ténèbres.
Eastwood du côté de Carpenter ?
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A contempler ainsi cette couverture
(c’est la première accroche du regard et du désir de se saisir
ou non de l’ouvrage…), on remarque que c’est le critique qui
annonce le réalisateur et non l’inverse, comme en 1990 où
nous avions, en haut du plan en noir et blanc, le nom d’Eastwood
occupant la largeur du cadre, et en en bas à droite, en plus
petite police, le nom du critique. Le miroir se serait-il
inversé ? Après avoir créé la critique et donner à vivre
(en pensées et mots mais pas seulement…) voici le cinéaste
révélé (sortir du noir) par les mots du critique. Cette dialectique
du créateur-créature, de ce couple secret où l’un co-existe
dans une relation faite de fièvres, d’attentes, de mélancoliques
rêveries parfois et de bouleversement esthétiques foudroyants,
où la réception de l’autre en soi est au cœur de sa vie, il
y aurait comme une logique affreuse mais nécessaire de surpasser
celui qui nous donna tant comme pour mieux le retrouver apaisé.
Ce visage un peu f(l)ou, un peu en retrait et qui fixe tendu
l’objectif de nos attentes, engouffré dans une obscurité sans
limite, contemple à l’aveugle celui qui le consacre « Passeur
à Hollywood »
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