PETIT
PANORAMA DE SERIES
TELE AMERICAINES
CONTEMPORAINES
Par
Jean-Michel WINGERTSMANN
« Dans l’utérus de l’amour
nous sommes tous des poissons aveugles »,est
un des fameux aphorismes ineptes et surréalistes de Victor
Ward, le narrateur mannequin de Glamorama de Breat
Easton Ellis. Cette remarque, qui oscille entre le sempiternel
refrain d’une chanson pop sortie d’un clip de MTV et le
slogan d’une réclame, aurait très bien pu être énoncé dans
un soap. En effet, que se soit dans certaines
fictions télévisées ou chez Ellis, ce qui se dit importe
souvent moins que le fait de le dire. Les programmes ont
subi et continuent de se voir infliger par les décideurs,
intentionnellement ou non, des contraintes. La bourgeoisie
américaine, mais pas seulement, a imposé à la société son
ordre des valeurs, avec ses normes moralisantes spirituelles
austères. Elle s’est heurtée à l’idéologie, largement séculière,
qui imprègne la Constitution américaine. Ces deux convictions
s'opposent depuis plus de deux siècles et la ligne de démarcation
n’en finit pas de se mouvoir. L'alliance contre-nature de
cette conception et de la communication de masse a engendré
des séries télévisées, dont la qualité artistique est subordonnée
à une orientation commerciale qui les uniformise et les
aseptise. Depuis plus de 10 ans, des séries novatrices comme
Twin Peaks, Profit et Les Sopranos,
entre autres, se sont imposés comme de grandes œuvres et
nous apparaissent comme un important objet de réflexion.
LES SERIES ET LA TELEVISION AMERICAINE
Le FCC (Federal Communications Commission),
fut créée en 1934 pour assigner les fréquences des stations
de radio et réguler toutes les communications par radio,
télévision et le câble. Le paysage audiovisuel seconcentre, actuellement, autour de quatre grands
groupes : ABC (filiale de Disney), CBS (appartenant
à Viacom), Fox (propriété de News Corp, le groupe de Rupert
Murdoch) et NBC (filiale du conglomérat General Electric).
Le FCC s'apprête aujourd’hui à autoriser News Corp et Viacom
à atteindre jusqu'à 45 % de l'audience nationale, au
lieu des 35 % autorisés jusqu’alors. Même si cette
éventualité est pour le moment repoussée, on peut craindre
queces deux géants de l’audiovisuel n’étendent
leurs possibilités de croissance au point de pénaliser les
petites chaînes qui verront, ainsi, se réduire leurs offres
de programmes créatifs. La télévision n’a joui historiquement
que de brefs moments de liberté, en 1987 le FCC réagissait
aux réclamations d’une certaine partie du public en adoptant
différentes mesures pour restreindre l’usage de termes sexuels
explicites (2). Une œuvre est difficilement visible dans
son intégralité, sauf sur la chaîne publique (PBS) ou sur
les réseaux à péages (HBO, SCI-FI Channel,
Showtime).
Même si l’influence des ultra de la Christian Coalition
sur la société américaine n’est plus que l’ombre d’elle-même,
la série comique Married… with Children a été attaquée
en justice par une téléspectatrice qui la trouvait trop
vulgaire. La diffusion des programmes aux USA a été largement
libérée de la censure gouvernementale parce qu'elle s'est
auto réglementée d'une manière plutôt vigoureuse (house
cleaning). Les chaînes ont adhéré volontairement à un autre
code conçu par la National Association of Broadcasters.
Les médias majeurs ont leur propre système d’autorégulation,
CBS, par exemple, a toute une équipe qui examine ses scripts
et ses images, ce qui a des répercussions déterminantes
sur l’évolution de ce média.