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Catherine Breillat, indécence et pureté (c) D.R. LIVRE

Catherine Breillat,
indécence et pureté

de Claire Clouzot
Par Nadia MEFLAH



ANATOMIE DE CB

Robert : « Mais enfin, on n’est pas là pour rassembler mais pour diviser ! »
Scénario Après la réconciliation d’Anne-Marie Miéville
Editions Cahiers du Cinéma, p. 87, 2000.

« C’est difficile de dire : je suis féministe et d’avoir en même temps une bite dans la bouche ! »
Barbara Kruger, cité par Claude Guillon dans Le Siège de l’âme, éloge de la sodomie
Editions Zulma, p. 127, 1999

« L’argent afflue vers la bêtise. C’est comme une politique d’abaissement. Cela va jusqu’à nier les auteurs. Les producteurs de ces divertissements devraient payer un impôt à l’Education Nationale pour abêtissement, alors qu’il faudrait pouvoir donner aux enfants, aux gamins, l’envie d‚aller voir Kiarostami. Je suis pour une taxe énorme sur les bombes à bêtise, sur la machine à abrutir particulièrement les enfants ».
Propos de Catherine Breillat issus du livre de Claire Clouzot, p. 155

Un paradoxe vient d’être soulevé en ce début d’année 2004 : alors que la cinéaste Catherine Breillat fait des films depuis près de trente ans (Une vraie jeune fille, sa première réalisation, date de 1975), il n’existait aucune étude un tant soit peu sérieuse et approfondie sur une œuvre. Une œuvre cinématographique (je ne connais pas ses nombreux romans) doublement marquée de marginalité et de popularité sulfureuse depuis l’affaire Romance en 1998. L’édition de deux livres est à ce titre un événement, beaucoup plus important que la sortie de son dernier opus Anatomie de l’enfer. Le terrorisme intellectuel qu’impose assez perversement la cinéaste à son public semble cette fois-ci ne plus fonctionner, tant le film « s’auto-suicide » deux fois (manière de s’enfoncer dans une solitude sans prise avec la compassion) : en sacrifiant Rocco Siffredi, réel personnage romantique qui fasse corps, et en surlignant jusqu’à l’excès l’horreur supposé de la femme chez le spectateur mâle, sa ritournelle qui semble ne plus faire valser les âmes. Au mieux le film irrite, au pire il fait rire. Ne reste ici et là que quelques traces déposées sur l'imaginaire mémoriel du spectateur, saisi par la beauté quasi spectrale de quelques plans. Très curieusement, le film clignote par intermittence d’effet flashs, d'un fugace sublime lors de scènes mutiques de monstration (sang, anus, regard) qui s'évaporent sous le discours redondant du propos (les mecs sont des salauds impuissants, la femme victime christique.) Alors que d’autre films, notamment Sale comme un ange, Parfait amour ou 36 fillette proposaient une aventure radicale du regard, et ce jusqu'au bout.

Une expérience de l’intime, du vivant, qu’hélas le cinéma de nos jours n’ose plus (ou/et ne sait plus) faire (Monteiro nous a quitté, il nous reste Oliveira le plus grand et Brisseau en France). Alain Bergala a de mots très durs et très justes pour dire l’asphyxie générale qui menace le cinéma français de notre temps (lire à ce sujet sa très belle lettre adressée à Arnaud Desplechin dans le numéro 588 de mars 2004 des Cahiers du Cinéma)