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Sur la jaquette du dvd de La
malédiction des hommes-chats, on peut lire une citation
de Serge Bromberg : « Un petit bijou du film
d’épouvante ». Pourtant, on ne trouvera pas plus
d’épouvante que d’homme-chats dans le film de Robert Wise,
le génial réalisateur de West Side Story et de quelques
films fantastiques dont La maison du diable. Sorte
de suite à Cat people de Jacques Tourneur,
La malédiction… met en scène l’ancien mari d’Iréna,
la femme-chat, remarié et père d’une petite Amy, dont l’imagination
troublante remet avec angoisse en mémoire des souvenirs
d’Iréna à son père. Le film flirte plus volontiers avec
le merveilleux qu’avec l’épouvante, bien que la vieille
femme de la maison voisine puisse un moment être inquiétante,
rappeler quelques êtres de maisons hantées ou quelque sorcière.
La malédiction est surtout un beau film sur l’enfance
et la solitude, mettant en parallèle Amy, la petite fille
sans ami, la vieille femme de la maison voisine, et sa fille,
qu’elle nie et enferme dans une profonde tristesse. Comment
constituer une famille lorsque le passé semble ne pas vouloir
se taire ? La solution pour chacun des parents du film
est d’abord l’oubli volontaire, voire le camouflage de tout
élément pouvant raviver les souvenirs. Car ce contre quoi
luttent les personnages est plus l’image du passé qu’un
mal présent, comme si une simple image pouvait bouleverser
l’ordre établi. Robert Wise travaille sur la puissance de
l’image, qui selon lui semble être bien plus bénéfique que
meurtrière, tout comme les dessins de félins d’Iréna dans
Cat People étaient l’exutoire d’un mal qui allait
se réveiller. Car afin de faire la paix avec son passé,
le père n’a d’autre solution que d’accepter l’image invisible
de son ex-femme qui vient jouer avec sa fille. Les univers
parallèles, passé et présent se mélangent pour ne former
plus qu’un. La malédiction est un film aussi sur
la puissance du cinéma, car il fait l’éloge de l’image et
de l’imagination.
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Nicholas Ray, quant à lui, se penche
sur la part d’ombre de l’image, ou en tout cas sur son ambivalence,
quand un flic trop violent manque de devenir meurtrier (sur
ce thème, Mark Dixon Detective d’Otto Preminger
est formidable), quand un tueur se révèle être un jeune
homme psychologiquement instable, quand une femme aux yeux
grands ouverts est en réalité aveugle. Nicholas Ray aime
à filmer les tortures de l’esprit, lorsque ses personnages
ne trouvent pas leur place, rebelles sans cause. Le tout
est de savoir si la société ne leur est pas adaptée ou si
ce sont les personnages qui ne s’y adaptent pas. Le flic
remis en question et la jeune aveugle recluse dans la montagne
offrent les deux visages de l’exclusion, deux figures solitaires
qui revendiquent leur autonomie tout en criant sourdement
leur besoin de l’autre.