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Salam Cinéma (c) D.R.

Dans une interview au magazine Film International à la sortie du film, le cinéaste explique que le bureau est un symbole de pouvoir, tandis que le périmètre réservé aux acteurs correspond à la contrainte à laquelle ils sont soumis, et le miroir (accessoire récurrent chez Makhmalbaf), représente la fonction du cinéma. Mais tout ce dispositif rappelle également la situation des Iraniens dans un régime qui limite la liberté d’expression et teste la capacité de résistance des individus face à un système répressif.

L’expérience démontre que peu de gens contestent les ordres du cinéaste-tyran, à part deux jeunes filles ambitieuses qui parviennent à se faire « embaucher » comme actrices bien qu’elles ne soient pas parvenues à pleurer sur commande, comme l’exige le test de sélection. « Elles représentent une génération qui préfère rire et avoir de l’espoir », se réjouit Makhmalbaf. Mais lorsque les rôles sont renversés et que le réalisateur leur cède sa place derrière le bureau pour qu’elles poursuivent les auditions, elles se montrent aussi impitoyables que lui. Le message du film, indique Makhmalbaf au magazine Film International, en est un de partage et de solidarité : « Lorsque vous parvenez à la réussite, dit-il, ne fermez pas la porte aux autres. »


BIENVENUE DANS VOTRE PROPRE FILM !

  Salam Cinéma (c) D.R.

Makhmalbaf interroge les candidats comme Socrate faisait « accoucher » ses disciples en guidant leur réflexion. Le cinéaste annonce la couleur dès le début : « Vous êtes à la fois le sujet et les acteurs de ce film. Bienvenue dans votre propre film ! » Mais c’est peine perdue : « Je veux faire du cinéma, mais je veux connaître mon rôle d’abord », lance une jeune fille. Un peu comme dans la vie, où chacun aimerait savoir de quoi l’avenir sera fait... « Si je te disais que ton meilleur rôle, c’est celui que tu es en train de jouer, en n’imitant personne », de répondre Makhmalbaf.

Cet « Aime-toi (et aide-toi) toi-même » adressé à ses compatriotes donne lieu à quelques scènes d’une beauté troublante. Citons par exemple cet aveugle qui dit avoir dormi dans un parc pour être sur les lieux avant tous les habitants de Téhéran venus participer à l’audition. Le jeune homme aux lunettes de soleil se lance dans une improvisation éloquente : « Mes yeux ne voient pas, mais les yeux du coeur voient », lance-t-il en évoquant son amour pour le cinéma. A la demande du cinéaste qui lui demande de pleurer pour tester sa conviction, il finira par enlever ses lunettes et se fait démasquer comme un imposteur. Makhmalbaf lui dévoile qu’il n’y avait pas d’autre rôle que celui-ci : être soi-même. Il aura marché depuis son village, tout seul, comme un aveugle, pour répéter un rôle qu’il aura lui-même choisi, celui de l’aveugle amoureux de cinéma !