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Wanda (c) D.R. DVD

Wanda
de Barbara Loden
Par Cécile GIRAUD


SYNOPSIS : Mariée à un mineur de Pennsylvanie et mère de deux enfants, Wanda ne s’occupe ni d’eux, ni de sa maison, et passe la majeure partie de ses journées affalée sur le canapé du salon, en peignoir et bigoudis. Sans personnalité ni volonté, elle se laisse « divorcer ». Seule, sans domicile ni moyen de subsistance, elle erre sans but précis, et fait la connaissance d’un voleur, Dennis, dont elle devient la maîtresse et complice

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POINT DE VUE

  Wanda (c) D.R.

Depuis sa ressortie en 2003, grâce à la passion d’Isabelle Huppert, Wanda connaît une très belle seconde vie. Wanda reprend enfin son visage sous les traits étonnants de Barbara Loden, et sa créatrice affirme son identité face à plusieurs générations de spectateurs qui, s’ils connaissent peu ou prou l’œuvre d’Elia Kazan, ne se souviennent sans doute pas de la silhouette gracile de l’artiste dans Le fleuve sauvage et La fièvre dans le sang. Actrice au théâtre et au cinéma, toujours chez Kazan qu’elle épousa, Barbara Loden signe avec Wanda sa déclaration d’indépendance : scénariste, actrice et réalisatrice, en somme créatrice d’une figure féminine unique mais surtout d’une figure cinématographique étonnante.

Entre le trop près et le trop loin, Wanda est un corps qui ne semble jamais être à la bonne échelle : tache blanche au milieu d’une carrière sombre, ramassant son charbon comme elle ramasserait des champignons, ses bigoudis sur la tête, elle est seule au monde, foncièrement et définitivement à l’écart d’une société dont elle ne semble pas même avoir conscience. Femme et mère dilettante, Wanda semble avoir été catapultée dans ce monde et le film par Barbara Loden, et s’éveiller pour la première fois à la vie au début du film, lorsqu’on la découvre endormie sous une couverture, apparue comme par magie au détour d’un plan. Au départ, Wanda aurait pu être l’histoire de ce couple que la caméra suit dans sa vie quotidienne, un matin de semaine. Le mari part au travail, la femme s’occupe des enfants, et Barbara Loden aurait pu faire de son film une fresque sociale, un témoignage sur les ouvriers d’une usine de l’Amérique profonde. Mais Barbara Loden n’est pas femme à filmer et à vivre la banalité d’une vie. Elle ne fait pas de ses personnages l’emblème d’un peuple, elle ne généralise pas ce qu’elle filme : au contraire, chaque personnage, chaque situation, même s’ils représentent une certaine catégorie, sont pris dans ce qu’ils ont de spécifique, de particulier. Pour Wanda, ce sera ses bigoudis et les étranges couvre-chefs dont elle s’affuble ; pour Mister Denis, ce sera la coupe à la brosse et l’air sévère.