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Invasion Los Angeles (c) D.R.

Dans They Live, le personnage de John Nada -qu’incarne Piper- découvre que le monde est secrètement gouverné par une race extra-terrestre qui réduit l’humanité en esclavage. La ville comme le pays est en réalité sous contrôle sans que la population ait jamais conscience de son asservissement, et a progressivement abandonné ses pouvoirs à la classe dominante corrompue - les politiciens, les bourgeois à travers l’influence des grands médias et des forces de l’ordre - qui opprime les populations les plus pauvres et les libres-penseurs. Ce sont d’étranges paires de lunettes qui vont permettre à Nada de découvrir la vérité. Lui qui, comme ses congénères, vivait sans lutter pour ses droits, découvre à travers ces verres fumés une nouvelle vision de l’Amérique, un pays en noir et blanc où le paysage, chaque objet, est couvert de messages subliminaux : « Obey », « Stay asleep », « No thought » qui intiment au citoyen l’ordre de ne jamais revendiquer son libre-arbitre.

  Invasion Los Angeles (c) D.R.
Nada devra rejoindre la résistance pour parvenir à faire voir à l’Amérique entière ce que seuls quelques-uns étaient jusqu’ici capables de voir. Lui qui n’était qu’un marginal parmi d’autres devient un héros, champion de l’humanité, anarchiste contre la violence d’un libéralisme foncièrement anti-naturel. Il devra se battre contre un monde passé aux mains de monstres aux visages hideux, y compris contre certains humains qui préfèrent collaborer avec l’envahisseur et trahir leur espèce pour accroître leur pouvoir.

Bien que développant sa narration à partir d’une dichotomie classique –d’un côté le monde doré des riches, de l’autre la misère et l’exclusion-, They Live se singularise par l’intelligence de son script qui joue sur l’apparente facilité de son propos. En effet, de nombreux films prenant pour cadre LA abordent tout d’abord l’image trompeuse d’une Amérique triomphante pour progressivement amener les personnages à une nécessaire traversée du miroir. The New Centurions (Richard Fleisher -1972), LA Confidential (Curtis Hanson -1997) ou plus récemment encore Training Day (Antoine Fuqua -2001) et Dark Blue (Ron Shelton –2002) partent de l’image d’une puissance conquérante, droite, infaillible, pour finalement donner la parole aux laissés pour comptes et aux marginaux oubliés par la société, ce au risque d’employer un schéma résolument moral. Dans They Live, Carpenter part au contraire de la réalité d’un campement de sans abris situé aux abords de la ville dominée au loin par les buildings. Ni morale ni compassion dans ce film dont le héros voyage des abris de fortune jusqu’au centre de la mégapole… Lui-même avoue « croire en l’Amérique ». Là est l’intelligence de They Live qui, tout en jouant sur la notion de réalité et de dissimulation, dispense dès les premières images la totalité de son discours. Du début à la fin du film, les marginaux ne sont ni plus braves ni plus méritants, la bourgeoisie n’est pas plus laide, c’est l’angle de vue qui a effectué un glissement. Le cinéaste ne dévoile jamais la pauvreté de Los Angeles comme Buñuel pouvait donner à voir la misère de Las Hurdes, il ne donne pas à voir les travailleurs précaires puisque eux-mêmes s’imposent à la caméra comme la véritable faune de LA. Et s’il est probable qu’au premier abord, le film semble traiter de la misère, son véritable sujet est la monstruosité de la bourgeoisie, ici montrée physiquement dans ces visages extra-terrestres comme écorchés vifs


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