 |
|
|
|
Voyons
les stars. Arletty, tout d’abord, tient un rôle de femme divorcée
en pantalon. Elle peut y ajouter quelques variations sur son
registre personnel : un rien de gouaille, quelques mots
familiers, et ce sourire omniprésent de femme qui prend la
vie avec légèreté. Quelques mois avant le tournage d’Hôtel
du Nord, Arletty ajuste son image à l’écran, celle que
l’on retient d’un film à l’autre et qui est exploitée par
les réalisateurs. Elle est avant tout enfant des faubourgs
parisiens, mais aussi femme libérée. Modernité et tradition
vont donc de pair pour cette actrice qui a été à la fois figure
de la comédie et de la tragédie.
Et puis Michel Simon, qui apparaît dans un récit parallèle,
inutile à l’intrigue mais propre à le mettre en valeur comme
il se doit. Egyptologue quatre fois marié, attiré exclusivement
par les jeunes femmes qu’il ennuie au plus haut point, il
est pris à son propre piège car courtisé par une femme plus
âgée. Le personnage évolue dans une situation classique du
comique de boulevard, l’amoureux importun qui ignore même
qu’il l’est.
Venons en à l’adaptation théâtrale. Il s’agit d’abord d’une
pièce de 1937 d’André Birabeau, auteur de boulevard prolifique.
Le théâtre, et surtout le boulevard, genre populaire par excellence,
était un vivier pour le cinéma. L’exemple le plus célèbre
est celui de Guitry, qui adaptait sans complexes ses propres
pièces.
|
 |
|
|
Dans le cas de La Chaleur du sein, l’origine théâtrale
est encore très visible. De par les dialogues tout d’abord,
très écrits, qui n’ont pas dû beaucoup changer de la pièce
au scénario. Il y a là la marque d’une époque où le bon mot
était plus important que le naturel du dialogue. D’autre part,
la structure met en relief les procédés comiques. Le parallélisme
et les effets d’annonces sont visibles tout au long du film
en raison notamment de la présence des trois « mères ».
Dans la partie « d’exposition », les trois mères
rendent visite successivement à Gilbert, sous l’œil ébahi
de l’infirmière. Bien sûr, les mères se succèdent de manière
chronologique, selon l’ancienneté. Et chacune lui laisse un
présent selon son caractère et l’âge auquel elle l’a élevé :
des bonbons, un livre et un jeu de carte. Le symbolisme est
ainsi très présent, voyant même.
Les trois personnages de mères sont intéressants dans la mesure
où ils sont proches de types théâtraux. Chacune représente
une qualité maternelle – douceur, sévérité et complicité –
qui correspond à une attente de Gilbert. Le fait qu’il ne
s’agisse pas de personnages complexes montre une fois encore
que le film se situe dans un système théâtral « classique »,
sans aucune prétention au réalisme. On peut néanmoins ressentir
un peu de distance lorsque les trois mères expliquent entre
elles, de manière redondante, leurs rôles respectifs.
|