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Un film plein de solitude. Une solitude entièrement refoulée pour d’amères compagnies. Une ambition réfléchie pour un désespoir tordu. Des images tantôt serviles, tantôt vaporeuses. Un passé qui vous rattrape dans la vieillesse : "La vieillesse, cette maladie dont on ne guérit pas". Un présent qu’il faut tarir d’éloges. Sans cesse. Un avenir qui ressemble au présent, qui brille dans le présent. Welles transforme, mais ne crée pas. Tout comme Lavoisier. Il joue à transformer les regards. Sa source, c’est dans le cinéma qu’il peut la faire émerger. L’image de Welles n’est pas qu’un mythe. C’est aussi une obsession superbe, embryologique, chirurgicale, et parfois incompréhensible. Evidemment.

  Citizen Kane (c) D.R.
1941. La guerre mondiale. Les Etats-Unis. Franklin D.Roosevelt… et ses deux jambes malades, usant la terre ferme, rongées par une maladie incurable. La puissance, la gloire, l’ambition, et Citizen Kane. Charles Foster Kane, une vie étrangement ambiguë qui ressemble à cette histoire des Etats-Unis, prise de tuberculose imbuvable. Une naissance et une mort, conjointement liées par la même idée : le jeu, et Rosebud (l’enfance). De la (re)naissance jusqu’à l’exode à Xanadu, domaine où le temps perdu se plaît à rougir. L’histoire d’un homme, vendu dés sa plus chère enfance à une banque, chargée de son éducation, guettant la réussite de Kane d’un œil vif. Un œil plus tard dépassé par les intérêts plus qu’audacieux de Kane, fidèle à des principes d’investigations mensongères, voué à sa propre image et à son ascension fructueuse. Magnat de la presse, par l’information il périra. A la fin de sa vie, attrapé par la vieillesse et la solitude (celle que recueille la vieillesse), deux des plus âpres et irréversibles frayeurs humaines, et caractérisées dans le film par les statues de pierre froide qui l’entoure dans son domaine de Xanadu, il s’éteindra en retrouvant un peu de son enfance, la seule innocence inavouable et affreusement fugitive. Ainsi, voilà l’étrange existence d’un être informel, qui aime puis qui n’aime plus, qui joue, qui ment, qui "fait", au sens mécanique du mot, de la vie, avec tout ce qu’elle comporte de succès éphémères, d’échecs et d’éternels chagrins.

Un homme parmi tant d’autres, qui accompagne le mépris jusque dans le sommeil de ses disciples et de ses ennemis, et qui fait de la loyauté, une inspiration conventionnelle, douée d’un narcissisme effrayant. Une vie cinématographique comme un frisson éventré, qui jaillit d’un mince tiroir de bureau pour gagner l’espace volumineux d’une armoire démesurée. La chair, le sang, et l’esprit qui s’endurcissent avec le temps. Cette chair peuplée de colères, de souvenirs, d’amour(s), de trop d’intensité dramatique. Toutes ces inventions naturellement humaines qu’on rendra pour l’éternité pendant que les lèvres des vivants (comme celles des médias qui enquête sur Kane) continueront de s’agiter. Citizen Kane, c’est finalement toute la vie de Welles. Ce sont des images troubles, des illusions vicieuses, qui jalonnent chaque vie, que l’on ne voit pas toujours, et que quelques privilégiés attribuent à la volonté. Delluc, essayiste et cinéaste-clef de l’Avant-Garde française, écrivait : "Les maîtres de l’écran sont toujours ceux qui parlent à la foule". Donc, ceux qui écoutent respirer, qui se taisent avant d’écrire, et de filmer. Alors, meilleures merveilles à cette œuvre prodigieuse, toute de poésie et d’évasions lunaires. Il faut du temps pour éclairer les absences. Certains n’ont encore rien appris, rien compris. D’autres font l’effort. La culture, c’est dans le cœur. Alors, quand elle sort, c’est à un déluge d’émulsions qu’il faut s’attendre d’assister. Comme toutes ces œuvres prises d’insolentes inquiétudes, comme ces pleines sources cinématographiques, qu’elles puissent nous réveiller, lorsqu’on se substitue à l’orgueil (inefficace à l’imagination), intellectuelle ou culturelle, qu’elles puissent nous faire trembler, qu’elle soit absolument nécessaire, à l’engagement de tout (dés)ordre, contre l’oubli et la gloire superficielle.

"L’Art pour l’Art", n’est-ce pas Wilde ?



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