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C'est dans les vieux pots
que l'on fait les meilleures soupes. Dans ces bonnes vielles
gamelles proverbiales également que l'on élabore
les histoires les plus intelligentes, les moins en proie à
la cécité. Pas toujours rutilantes en bout de
courses, parfois même comme en sueur tant elles ont
roulé sous leurs grasses aisselles les situations les
plus aberrantes, les moins acceptables parce que tout simplement
cruelles; au bord du précipice existentiel de chacun,
elles ont pourtant l'immense et irréprochable intérêt
d'être hors-la-loi. Luxe qui dans notre société
malheureusement assez médiocre, dans laquelle même
Monsieur Propre risque de se retrouver à pointer aux
Assedics à force d'astiquer la moindre aspérité,
propose gentiment mais sûrement une alternative au Lexomil
créatif ambiant. Avec, mais c'est un autre sujet, plus
ou moins d'adresse et de dextérité. Ici, ce
qui compte avant tout, c'est l'intention."(...) toutes
ces personnes autour de vous qui ont un avis sur tout, ce
qu'il faut écouter, où il faut aller, qui vous
entraînent l'a où vous n'avez aucune envie d'aller".
Cette phrase affutée, à la lame bien tranchante,
c'est Thom Yorke, le leader aiguisé de Radiohead qui
l'a prononcée ( Libération du 2 octobre
00).
Sous ces propos cruciaux à l'épilation altruiste,
prédicat dont se revendiquent les plus farouches des
individualistes, on entrevoit l'envie farouche de tout foutre
en l'air et, surtout, de résilier l'abonnement avec
l'autre -ce soi-disant ami qu'on se suggère faute de
mieux s'estimer. Expédier en colissimo l'autre, le
fameux, en enfer, là où finalement il est né,
la région d'où nous sommes tous originaires.
Que le bon peuple spectateur, adepte quasiment inculte de
la polyphonie du fait divers papier, cathodique ou télévisuel
dont il se repaît infos après infos de façon
presque lubrique, ravale sa bile : ce ne sont là que
des propos faussement performatifs et qui plus est destinés
à rester inassouvis. Pétards-mouillés?
Nous connaissons nos limites, slalomant entre de pénibles
tentatives de transparence, messes-basses et autres non-dit.
Et pourtant, tout est là. Les balles sont à
blanc, mais la structure "sujet-verbe-complément"
est souvent en surchauffe. Elle turbine à fond, croisant
le fer avec notre incapacité, notre impuissance humaine,
dans son antonymie à l'animal, à en découdre
avec nos tendres ennemis. C'est encore de ce bon vieux cinoche,
instrument de désincarcération sociale, que
l'on extrait notre forfait illimité de fantasmes.
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Dans une époque reculée,
les années 80 - Tapie et le fric roi au firmament de
l'indécence, les règles étaient dégueulasses
mais avaient le mérité d'être claires
: il y avait les riches et les pauvres, les méchants
et les gentils en somme. Quelque trois lustres plus tard,
fusion économique et, par extension, mutation culturelle
obligent, le terrain sur lequel évoluent ces deux catégories
a accueilli des herbes folles génétiquement
modifiées et, parce que les cantonniers de la nouvelle
économie se sont bien gardés d'y passer un coup
de tondeuse, on ne distingue plus aussi simplement les deux
équipes, pas forcément adverses du reste. De
l'autre côté du e - miroir aux alouettes, les
évidences d'antan tirent la tronche. Voilà que
la bonne vieille pop et ses guitares floydiennes partouzent
avec la racaille électronique. Des combos tels que
A-ha, aussi cavalière que l'affirmation puisse paraitre,
avaient amorcé la métamorphose du rock jurassique
en un cancrelat surdoué du bidouillage sonique.
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