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Seul le monde (c) D.R. LA VERITE SI JE MEURS



Par Cyrille GUERIN


"La vérité des images est foncièrement une affaire de montage. L’image elle-même ne garantit rien". Cette parole quasi biblique qui devrait être gravée dans les boîtes crâniennes vidées des élèves des prestigieuses écoles de journalisme télévisuel, parole appartenant en outre aux Dix Commandements du cinéma, était délivrée par Pierre Legendre, historien du droit et des institutions, en décembre 2000 dans un hors-série sublime des Cahiers modestement consacré au "Siècle du cinéma". Le nouveau millénaire ouvre les hostilités avec Seul au monde de Robert Zemeckis et Sous le sable de François Ozon. Rarement simulacre et contestation sociale n'auront été portés à un tel degré d’opiniâtreté cinématographique. Où comment se foutre noblement de la gueule des encartés que nous sommes dans une tendresse infinie.



  Sous le sable (c) D.R.

Et merde ! mon walkman cd est tombé en rade. La cellule contenant le faisceau laser est niquée. C’est le monsieur tout en vert et fort peu courtois de la FNAC qui me l¹a confirmé, sans délicatesse aucune bien entendu. "Condoléances" n’apparaît pas dans sa langue mercantile, faussement consumériste. Le gus n’a jamais assisté à un enterrement, ma parole. Il ne connaît que la résurrection, celle qui se situe au premier étage du magasin Pinault. Comme tout s¹achète, sauf les rédacteurs d'Objectif-cinéma.com, le prix de la réincarnation de mon précieux compagnon de métro et de TGV me coûtera 699F. Problème, c¹est le début du mois. Donc déjà la fin. Toutes mes thunes sont passées dans divers abonnements; dans le remplissage du frigo (un vrai de vrai acheté par mes parents au début des seventies à une époque révolue où l’électroménager était construit pour durer); dans quelques biscuits pour ma discothèque - deux skuds bombesques des JB’s pour seulement 150 balles, un album hype et tonitruant de mix techno filtrée à la Daft Punk (John Thomas), la BO qui fume la moquette et plus si affinités de Tommy par les Who; dans ma mutuelle (ma maman adorée s’inquiète pour mes maux de dents à répétition, tant qu'elles ne rayent pas le parquet...) et, pour finir, dans une quantité irraisonnable de binouses dégustées jusqu'au coma avec P, sosie d’E.D. Heureusement que la Saint-Valentin ne passera pas par moi.

Le lave-vaisselle, la bouilloire, le fer à repasser, les plaques électriques, le modem viennent à nous lâcher et c¹est le ciel qui nous tombe sur la tête par Toutatis. Car dans un monde en voie diserte et proprement dégueulasse de Vivendisation, donc de plans sociaux aussi imparables, nettement moins dandys toutefois, qu¹un fatal "Around the world" diffusé en boucle, l¹idée, dépressive pour beaucoup, synonyme de bouée de sauvetage pour pas assez, de disparition matérielle ou humaine reste insupportable. Quand R partira en juin, ce sera pas bien mais c'est dans le contrat. Quand Gyzmo, mon horrible et néanmoins attachante chatte, a décidé de tirer sa révérence féline l'an dernier victime d¹une abominable agonie due à une salope de tumeur d'origine inconnue (la loterie, selon le véto), j¹ai chialé de bonheur (passer des journées à déceler dans son regard triste et abattu la moindre manifestation de dépit était devenu effectivement intolérable) en l’emmenant vers sa chaise électrique à elle, deux piqûres et puis s¹en va à la crémation (400F pour récupérer les cendres, tout n¹est donc que poussière).