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L'année s'est également terminée sur deux des nombreux festivals au Japon, Le Tokyo International Film Festival, et le tout récent Tokyo Film Ex. Deux échelles, deux conceptions, deux ambitions. La force du festival International de Tokyo se résume par le cumul des événements parallèles: un festival fantastique, une sélection de films de femmes, une section « Prism » consacrée à un pays différent chaque année (cette fois la Corée, forcément) et enfin un programme qui a pour titre Japan Cinema Now. J'ai vu le programme, et ce n'est pas vrai, ce n'est pas ça le cinema japonais aujourd'hui... Cependant, en sélection officielle, nous eûmes droit à deux films de Takashi Miike, un remake de la comédie coréenne The Quiet Family, et une comédie musicale yakuza, The Agitator. Sa faiblesse : aucun véritable directeur de la programmation pour le festival lui-même, qui offre pourtant un prix, et qui a les moyens d'inviter un jury prestigieux, préside cette année par Norman Jewison. Ce festival ne joue plus sur une notion de découverte, ou de cinéphilie ; cette fonction est déléguée aux événements satellites. Il devient avec chaque édition une gigantesque vitrine de promotion pour les gros  films qui sortiront au Japon dans les mois à suivre, il fait office de festival d'avant-premières et chaque film n'a droit qu'à une projection. De plus, après le 11 septembre, de nombreux invités étrangers annulèrent leurs venues; dans la frange un peu edgy qui fit le voyage, Pitof et Vidocq, et John Cameron Mitchell, Hedwig, et ses centimètres de colère. Sous le contrôle de la vieille garde, avec néanmoins une infrastructure efficace et des moyens financiers importants, il ne lui manque qu'une véritable orientation, une identité de programmation pour que ce festival puisse espérer rivaliser avec d'autres en Asie, comme ceux de Pusan et Hong Kong.

  Hou Hsia Hsien (c) D.R.

Pusan est d'ailleurs devenu la référence en Asie et le jeune festival Tokyo Film Ex s'en inspire. Film Ex est organisé par de jeunes producteurs qui dirigent une boîte nommée T-Mark. Celle-ci est « subventionnée » par Office Kitano, bien que Takeshi Kitano ne pose aucun droit de regard sur ce qui s'y trame. Ainsi, T-Mark a co-produit le film chinois Plateforme, et prépare d'autres co-productions, des films iraniens cette fois. Film Ex, sous le regard de son excellent programmateur Shozo Ichiyama (jadis au Tokyo International Festival...), mise sur le cinéma indépendant, priorité sur le « jeune » cinéma d'Asie, avec un véritable parti pris auteurisant... Le festival, qui offre également un prix, avait un jury présidé par Hou Hsiao Hsien. Peu dire qu'ils choisissent de passer à coté d'une foule de choses. Un seul film japonais figurera dans la sélection officielle cette année, l'excellent Blue Spring de Toshiaki Toyada qui avait déjà réalisé Pornostar, un film terrifiant sur les conflits entre les nouveaux psychokillers de 17 ans au Japon et les yakuzas qui veulent les recruter. Blue Spring, avec Ryuhei Matsuda de Gohatto, est adapté d'un manga populaire sur un lycée dans lequel les enseignants ont abandonné le pouvoir aux étudiants. Encore un film de plus sur les maux des adolescents Japonais, mais qui offre une intransigeance rock et trash, dans son scénario, et une rigueur dans sa mise en scène. À la fin du film, je croisais le vénérable Max Tessier qui roulait des yeux en demandant « est-ce bien raisonnable ? ».

Ces deux festivals eurent le mérite d'organiser respectivement des rencontres entre cinéastes qui firent le bonheur des cinéphiles. Le festival international de Tokyo offrait une conversation entre Shohei Immamura et Takashi Miike, deux mauvais garçons du cinéma japonais... On mesure ainsi au Japon les espoirs fondés sur Miike, lorsque celui-ci se trouve devant un des piliers de la Nouvelle Vague japonaise, deux fois primé a Cannes, échangeant des propos sur ce que signifient le risque, l'audace et la marge aujourd'hui, à l'heure où pratiquement tout le cinéma japonais est produit par des indépendants qui n'ont pas de compte à rendre aux pontes de studios. Film Ex, plus sobre et sévère, avait invité Horikazu Koreeda et Hou Hsiao Hsien à parler de cinéma. Les deux rencontres furent par la suite diffusées sur l'excellente chaîne japonaise Cinefil Imagica, et il faut espérer qu'elles seront un jour traduites et publiées pour les lecteurs francais.

Le Pacte des loups (c) D.R.

Enfin, ces derniers mois, la France était chez elle au Japon, avec le passage de Jean-Pierre Jeunet et Audrey Tautou, Pitof, Jeanne Balibar, Christophe Gans, Jean-Jacques Beineix. Prochainement, ce sera au tour de Claire Denis. La presse féminine japonaise et ses lectrices font présentement un triomphe à Amélie Poulain grâce à une promo qui laisse croire à ces jeunes femmes que c'est le Paris de Jeunet qu'elles trouveront lors de leur prochain voyage... Vidocq et l'attachant Pacte des Loups (qu'on connaît également sous le nom de Il etait une fois les dents de la mer à Sleepy Hollow, et sur lequel je dirai plein de bonnes choses ici) sortiront dans les prochaines semaines. Les Rivières Pourpres avaient. peu convaincu au Japon quant à cette nouvelle école de genre en France. Depardieu et Le Bihan qui font Jet Li... les arts martiaux on connaît, le Japon demande autre chose (il a boudé Tigre et Dragon). Les contextes historiques de Vidocq et Des Loups feront peut-être la différence.

Pour clore l'année, citons un film de Shinsuke Sato, ShurayukiIhime (qui sortira à l'étranger sous le titre de Princess Blade). Un film qui tente de renouveler le film chambara / yakuza feminin, dans l'esprit de la Pivoine Rouge, mais à la sauce Tigre et Dragon / Matrix. Un film d'action, une série B dans son budget, Sato, comme Miike sans l'hystérie, pointe vers un avenir possible du cinéma japonais : revoir, revisiter ces propres genres. On parlait, il y a 2 ans, d'un remake de Zatoichi, le sabreur masseur aveugle, réalisé par Takashi Miike, avec Takeshi Kitano dans le rôle principal. Le film ne se fera sans doute pas, mais il continue de faire réfléchir l'industrie sur les erreurs à corriger pour 2002. Shinsuke Sato a modestement fait un premier pas.



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