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Il aurait pu en effet
arrêter l’assassin de son oncle avant le drame, mais
il ne l’a pas fait considérant que cela ne le concernait
pas. Dorénavant il ne laissera plus la police
se débrouiller toute seule. Comme lui a rappelé
son oncle peu avant sa mort, " à grands pouvoirs,
grandes responsabilités ". Cette maxime va
régler sa nouvelle conduite.
Spiderman n’est donc pas seulement un jumeau caché
d’un Nicolas Sarkozy ou d’un Rudolph Guliani, l’ancien maire
de New York inventeur de la désormais célèbre
" tolérance zéro ". Il est
aussi le représentant d’une certaine Amérique,
celle qui a tendance à se prendre pour le nombril du
monde. Dans la fiction, Spiderman pourchasse les petits malfrats;
dans la réalité, Bush s’occupe des grands terroristes.
Les cibles sont d’une échelle différente, mais
c’est le même axe du mal qui est combattu. Quand le
Bouffon Vert s’attaque à la tante de Peter, il lui
demande de finir la prière qu’elle avait entamée.
" Délivre-nous du mal ", s’écrie-t-elle
alors provocant le rire sardonique du méchant verdâtre.
Le film propose également
un futur politique inquiétant. Dans l’époque
de Spiderman le monde est unifié dans une sorte d’organisation
planétaire, dont la fête annuelle donnera lieu
à l’une des scènes les plus spectaculaires du
film. Cette organisation a pour siège New York (comme
par hasard !), elle est aux mains de groupes financiers
très puissants, et notamment de firmes militaires (comme
par malheur !). Pourtant le jeune Peter, dans sa lutte
contre le crime, ne semble pas s’offusquer d’une telle situation,
d’une dictature larvée. Pour sa défense, il
faut signaler qu’il n’est pas le seul puisque la population
de New York dans sa grande majorité court célébrer
la fête du monde unifié. Son statut de héros
pouvait lui permettre de remettre en cause le système
dans son entier. Mais il ne fera pas, bien trop occupé
qu’il est à soigner sa cote de popularité.
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Toute fiction est valable,
et l’univers des supers-héros est souvent répétitif.
Le héros orphelin, le méchant savant fou, les
personnages mi-humains mi-animaux : toutes ces recettes
ne sont pas neuves. Mais ce Spiderman est contestable, car
il accole sans vergogne réalité et fiction.
Le monde où vit Peter Parker est en apparence semblable
au nôtre, mais il est en fait très différent.
La démocratie semble ne plus exister, les institutions
paraissent avoir disparu ou ne plus posséder aucun
pouvoir. Pas de maire, de juges, il ne reste que des policiers,
des pompiers et des militaires.
D’autres comics ne laissaient
planer aucune ambiguïté. Les dessins de Batman
créaient une atmosphère inquiétante,
et pour le coup profondément irréelle. La ville
de Gotham City, théâtre des opérations
de la chauve-souris masquée, était un ensemble
d’immeubles immenses plongés dans une nuit quasi permanente.
Bref la symbolisation d’une société fantasmagorique
qui justifie la naissance de créatures comme le Joker
ou Double Face.
Déjà dans la bande dessinée
d’origine, les aventures de l’homme araignée provoquaient
un certain malaise. Mais le passage sur grand écran
accentue encore cette désagréable impression.
Le réalisateur Sam Raimi a décidé d’insister
sur la métaphore du passage à l’âge adulte,
à travers la mue de l’adolescent en super-héros.
Cette démarche distingue son Spiderman
de la majorité des blockbusters. C’est tout l’intérêt
du film mais aussi toute sa limite. Sam Raimi et surtout David
Koepp, qui a écrit l’histoire de ce film comme de bien
d’autres, puisqu’il est l’un des scénaristes hollywoodiens
de référence, ne sont pas allés au bout
de leur étude de mœurs. Mais pouvait-il en être
autrement ?
Un film basé sur
Spiderman doit avoir sa dose de combats dantesques et d’explosions
titanesques. S’appuyant pendant une très longue partie
du film à ces personnages, et on lui sait gré,
il ne reste que peu de temps à Sam Raimi pour approfondir
encore son propos et le dégager de la simple glose
consensuelle. Il intègre donc, contraint et forcé,
les scènes d’action tant attendues par le public adolescent
que les producteurs cherchent à séduire en priorité.
Il oublie malheureusement l’angle original de la première
partie du film. Le thème de la misère adolescente
nous est rabattu à longueur de séries télé
ou de talk-shows, Raimi devait donc développer son
thème pour éviter les clichés qui le
guettaient. Mais par autocensure ou conformisme, le réalisateur
d’Un plan simple se contente de la chantilly
sans attaquer le gâteau. Ca mousse et c’est joli à
regarder, mais ça manque de consistance.
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