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A partir de là, j’ai officiellement décidé de me passer de la moindre " Identité " ! Ainsi, j’évitais l’Actualité… je passais inaperçu… et je donnais tout ce que j’avais, tout, au cinématographe ! Non au monde civilisé ! Il faudra lutter ! Eviter le moindre excès de zèle du réel. Pour cela, j’ouvris des paradoxes en moi qui trichèrent avec le réel ! Ca a bien marché ! Le réel avait perdu ma piste. Aux autres, le réel ! Aux saisons cyniques, le réel ! Aux cinglés des ministères, le réel !

" Mais depuis quand ? A quelle date, votre refus d’assumer votre vie dans le réel ?

- Mais… depuis ce jour… de 1895, le 28 décembre, je vous le répète !… Ah mais, arrêtez les " Pourquoi " ! Je vous ai dis, arrêtez ! J’étripe ! Je coupe ! 

Après la projection des Frères Lumière, j’ai décidé… décidé sans hésiter de me donner au cinématographe. Plus tard, on m’a dit qu’il fallait bien du courage pour décider si vite de cette " vie cinématographique ". Oui… enfin… bon… c’est naturel ! Du " naturel " que je n’ai pas eu besoin de chasser pour qu’il vienne à moi au galop !

Il n’existait pour moi pas de choses aussi fort et compréhensif à la fois que le cinématographe : c’était tout dit !… Tout pensé ! En plus, j’évitais la correction monumentale de mon père, excédé par mon retard… ce 28 décembre. Je loupais le dîner familial… je quittais mon foyer… oui, celui-là, vous savez, où je rêvais ! Des rêves trop réels finalement ! Et puis, je donnais de l’Espoir : du " chaud ", pas du " synthétique espoir ", qu’on a l’habitude de voir chez les pauvres gens lorsque les autres gens… les gens de la Haute, de la très Haute société se penchent sur eux et les font sourire en poussant le sadisme, en leur donnant des miettes de pain, les restes à finir, non… pas celui-là, pas de l’espoir conservé dans le formol et qu’on sort les soirs précédents les batailles militaires ! Les tueries ! De l’Espoir, bien juteux, que Madame Bovary aurait volontiers pris pour du Bonheur… je donnais de l’Espoir à mon manuscrit Cinextence, en perte sèche depuis trop longtemps.


(c) Jonathan Carriere

Ce que je vous raconte, vous devez le voir, puis l’entendre doucement, et puis me lire enfin ! Ou écrire par-dessus moi, à votre tour ! Peut-être agirez vous autrement, et que vous ne demanderez plus pourquoi… plus pourquoi… jamais ! Je dis ce que je suis et depuis la naissance du cinématographe, je me sens " moi ", je me sens " là " en " moi ". Et à l’approche du vingtième siècle, je commence déjà à voir… à bien voir… du " voir " fait avec du " voir ", devant l’écran ! Sans le réel !

Je vais pas raconter des histoires… rester bien poli, tout ça pour respecter le réel, ce maudit dictateur de nos émotions… non, je vais pas raconter des histoires, sinon, on pourrait me chercher, me faire des problèmes, et alors, qu’est-ce que je ferais ?

Avant tout le monde… je sais déjà que le cinématographe, cette invention, ne vient pas du démon, ni de l’Homme… C’est une invention qui s’est servie des mains de l’Homme, certes, mais qui s’est faite toute seule, pour le reste ! Moi aussi, j’avais envie de me faire tout seul… Tout seul, ça voulait dire moi et… le cinématographe… et moi ! et je ne vais pas raconter des histoires pour toucher à la gloire sinon on pourrait chercher des raisons pour m’enfermer, et alors c’est pas ce que je veux, mais je vais tout dire quand même, c’est odieux ce qu’on nous a fait croire ; c’est odieux ! Je suis là ; longue espérance au cinématographe ; longue espérance… loin de la faim, loin de la mort ! La voilà, mon histoire ! Qu’elle soit longue et immortelle ! 



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