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Nice People (c) D.R. NICE PEOPLE - #18
Les enfants de la télé
Par Cyril JOHANNEAU


Il ne s’agit plus de penser la télévision comme partie de notre réalité : elle est notre réalité. Nous pensons télévision, nous buvons télévision, nous dormons télévision, nous baisons télévision : nous sommes ni plus ni moins que ces Nice Lofteurs avec lesquels nous vivons, des enfants de la télé. Voilà ce que prétend Nice People, programme de télévision-réalité.



  Nice People (c) D.R.

Avant de commencer, je voudrais juste vous parler d’une petite chose qui me pose question. On avait pris l’habitude, depuis quelques jours maintenant, à ce que le résumé, donc la journée, commence par l’image de Perso en train de dormir, pour signaler justement qu’il est tant de se réveiller. Or, cela fait deux jours que cette image devenue cliché a fait place à celle de Prosper et Eleanor, enlacés, finissant leur nuit. Bon, pourquoi pas, après tout ? Non. Ce qui me taraude, c’est qu’on nous les montre chaque soir se couchant dans le cabanon suspendu, et qu’on les retrouve chaque matin se réveillant dans le dortoir, au milieu des autres. Le sens de cette migration nocturne m’échappe. Ou est-ce la preuve par l’image d’un authentique transport amoureux ?

Authentique ou pas, le couple franco-britannique ne perd pas une occasion de se bichonner et de se bizouiller , quitte à rester à l’écart du groupe. De fait, Eleanor éprouve un malaise grandissant : « Finalement, on devient seuls face à huit. Je ne serais pas étonnée que les nominés soient toi et moi », confie-t-elle à Prosper. Quoi qu’il arrive, ce qui est sûr c’est que cette journée, telle que montée et montrée dans le résumé, est une journée terrible pour le Français, et par ricochet pour l’Anglaise. Il est au cœur de toutes les polémiques, il est la cible de toutes les réflexions, il stigmatise tous les problèmes du groupe. C’est pourquoi, je n’en parlerai pas aujourd’hui. Non par compassion : je n’éprouve pas une grande passion pour ce compatriote. Simplement, l’épisode d’aujourd’hui est tellement travaillé et nourri par cet acharnement digne d’une battue, qu’il me devient impossible de ne pas me repositionner. Ou alors, on ne sait plus qui sert la soupe à qui. De la même façon que je ne pus me gausser de la situation d’Elena, (cf. : Les niet d’Elena), il m’est impossible de continuer à le railler, de concert avec à peu près tout le monde, et à favoriser un Prospericide pas très propre. Cela relèverait davantage du sadisme que de la raison.

Nice People (c) D.R.

Tentons de retrouver un peu de raison. Et de voir quelles raisons peuvent se cacher derrière ce lynchage. Globalement, disons que les Nice Lofteurs reprochent à Prosper ce qu’il n’est pas : il n’est pas « vrai », il n’est pas partie prenante dans la vie domestique, il ne fait pas comme ci, il ne fait pas comme ça, etc. Soit. Mais, au lieu de crever l’abcès une bonne fois pour toutes, ils s’ingénient à le triturer et s’excuser dès que ça fait mal. Plutôt que de lui parler franchement et tous ensemble, ce que leur conseille, d’ailleurs, Christophe Dechavanne - à quoi Nalle répond que c’est au Français de s’intégrer (!) - ils préfèrent l’entretenir séparément, et non moins perversement puisque, sous couvert de franchise, ils le noient sous les récriminations, toujours les mêmes , sans jamais lui dire le fond du problème. 

Et pour cause. Le fond du problème est certainement moins ce qu’il n’est pas que ce qu’il est. Plus exactement, ce qu’il a et ce qu’eux n’ont pas. En effet, dans l’atmosphère de manque affectif et sexuel régnant au sein de la Villa, Prosper est le seul à être en couple, et qui plus est à y trouver un certain épanouissement. Feinte ou pas, consommée ou pas, cette relation exacerbe l’agacement des uns et des autres. Du coup, Prosper-le-fort-en-gueule se retrouve à avoir toutes les qualités, et les défauts surtout, pour incarner le nerf de la guerre. Il devient, au fil des jours, le réceptacle idéal de toute l’agressivité due à la frustration sexuelle de ses Nice co- Lofteurs . Et en plus, il se paie le luxe de les narguer en revenant parmi eux après avoir été nominé. Ça n’est plus possible.