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Nice People (c) D.R.
En effet, dans Nice People, les corps, bien qu’exhibés à longueur de journée, ne jouissent jamais d’une totale liberté. Hormis dans les circonstances particulières de l’assouvissement de besoins naturels, la nudité - et quelle nudité ? - n’y a pas sa place. Non qu’elle soit prohibée, encore qu’elle serait certainement censurée, mais les candidats se l’interdisent. Par pudeur ? Par honte ? Cela les regarde. Ce qui importe c’est le retournement à l’œuvre. Ainsi, par exemple, le corps est davantage vêtu la nuit que le jour. Personne ne se douche jamais nu. Dans ce spectacle de corps, qui fait de la jeunesse une affaire de paraître et de cosmétique, le corps reste le bastion le plus défendu. L’ultime rempart de la séduction.

Pas seulement. Peu à peu le corps perd de son intimité. Dans sa relation à l’autre, mais aussi et surtout dans sa propre relation, son propre regard. Le divorce a lieu entre le Nice Lofteur et son corps. Quel est ce corps qui lui fait face, s’anime plus que de raison, se crispe, et ne cesse de lui faire face ? Quel est ce corps où il est seul à ne pas se reconnaître ? Où il refuse de se reconnaître et y aspire pourtant du plus profond de son être ? La tâche, infinie, consiste pour le Nice Lofteur à tenter inlassablement de se réconcilier avec son corps. Alors même qu’il s’oppose à lui, se joue de lui et l’épuise. Entièrement à la merci d’autres mains qui travaillent à en tirer la substance pour la réduire à quelques images. Mais, les Nice Lofteurs jouent le jeu comme pour mieux se construire ou s’inventer un corps où loger l’objet de leurs désirs et délits. Ils n’acceptent pas la dissolution. Au contraire, ils résistent en essayant de repousser toujours plus loin les frontières balisées d’une géographie qui leur est imposée et qu’ils s’imposent. C’est la main de Raimondo dans le corsage de Karolina , c’est la main de Prosper glissant dans le pantalon d’Eleanor, et immédiatement chassée, c’est la chute de reins de Katrin collée sous le nez de Raimondo , pour qu’il admire la coupe de son pantalon, c’est le galbe d’un sein que Katrin , encore, dévoile à Raimondo , encore, pour qu’il admire son bronzage, etc. Ni séparés, ni réunis, les corps errent dans un no man’s land où ils sont à inventer pour exister. De sorte que nous assistons à une permutation du fictif et du réel : le corps est fiction. Fiction dont on attend tout, et qui s’exprime autant par la gymnastique que par la parole. En attendant que s’établisse la communication des corps, des langues, du corps de la langue et de la langue des corps.

  Nice People (c) D.R.
C’est pourquoi, dans cette géographie de liberté corporelle restreinte, où le corps jamais n’exulte, le geste de Serena est acte de libération. Loin d’être décadent, ce geste « pour rien », inutile, devient beau en ce qu’il se détourne de la beauté des choses. C’est un geste utile. C’est la vérification que son corps est bien le sien. L’évacuation de la fiction et la réappropriation du réel. C’est la reprise en main, le réarmement presque, d’un corps par trop écartelé. En ce sens, son geste nous donne à méditer sur l’utilité de l’inutile.

Nice People , plus qu’une émission culturelle, un programme cérébral.




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