Le cinéma, c’est donc plus que jamais le
lieu du père à condition qu’il n’y soit pas - on se lève tous
pour Daney. Un sas de désobéissance qui, aujourd’hui, vu l’inflation
du retour à l’ordre – les ricains, toujours une longueur d’avance,
l’ont compris qui ont sacralisé Schwarzie, chantre de l’autorité,
en gouverneur de Californie - ne demande qu’à s’émanciper.
Soumission quasi partout, résistance dans presque tous les
arts. Presque car si l’on prête une oreille attentive à la
production musicale depuis, disons 2001, it smells like outre
tombe. Des Strokes, dont la seconde et récente livraison,
ressemble comme deux gouttes d’eau pas férugineuse à des feux
follets s’échappant de la tombe des défunts Velvet et Television,
jusqu’aux plébiscités outre Manche Darkness, la nouvelle coqueluche,
dans sa acception la plus maladive, du NME, en passant par
Stellastarr, resucée new yorkaise d’Interpol, eux mêmes photocopies
de la new wave britonne du début des eighties, on en arrive
à ce triste constat : tout se recycle. Pas grand-chose
ne s’invente. Ne se réinvente. Le cinéma, lui, toujours à
la pointe des coups de torgnole dans la face des pères, préfère
le maquis. A quelques collabos près - Matrix dès ses
débuts se vautra dans un impressionnant simulacre de sédition,
le septième art, toujours aucune progression dans ce classement
depuis plus d’un siècle, garde son majeur bien en l’air. Tutoyant
les anges, et sans crampe notable. En tant que cautionnaire
de la rébellion, il a, en cette époque de réhabilitation des
bonnes mœurs et de manichéisme axé du mal, bien du pain sur
sa planche, pas des plus pourries.
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Il n’est donc guère étonnant qu’à tous les
étages de la fusée image, soit le triptyque télé-cinéma-apparences,
l’homosexualité, vecteur de l’insoumission, dispose de quelques
leviers de commande. Ainsi mi-octobre, le Marais parisien
s’exhibait Porte de Versailles pour la modique somme de 10
euros et pour, paraît-il, en finir avec les clichés. Pédés
et goudous, selon les organisateurs, ne seraient pas que des
cartes bleues bipèdes. Résultat : une brochette de représentants
chicos et bobos animés par, on n’en doute pas un seul instant,
la face humaine de l’homosexualité. A preuve, cette série
de conférences pertinentes (suicide chez les jeunes homos,
coming out or not, l’homosexualité en entreprise…) rythmée
par un mix de BPM environnants et de mélodies de sabots récipiendaires
de CB. Côté sublimation des poncifs, on repassera. Ou non.
La téloche n’est pas en reste, qui a bien compris qu’homos
et lesbiennes étaient de bons clients. Le cultissime « Y
a que la vérité qui compte » supervisé par les gay friendly
Bataille (le grand) et Fontaine (le gros) reçoit régulièrement
des archétypes piochés dans la fournaise homos :lesbos.
Lionel est amoureux de José, mais il ne sait plus comment
lui dire. Jean-Jacques en est, mais il ne sait pas comment
l’annoncer à ses proches. Un coup de rideau et quelques échanges
de banalités plus tard, genre les homos sont comme tout le
monde – le fameux droit à l’indifférence, et les affaires
se trouvent médiatiquement réglées. Là aussi, bien que l’intention
soit louable, on ne sort pas des lieux communs hétéro normés.
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