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Incendiaire

Ainsi en est-il de la préoccupante déferlante Real Tivi. Car au décorticage complaisant auquel on assiste passivement depuis des lustres (un Français sur deux serait, selon un sondage Télérama récemment publié, mécontent des programmes nationaux toutes chaînes confondues tout en continuant, dans un bel élan masochiste, de les mater sans critique digne de ce nom aucune : ça en dit long sur la tronche de l’Hexagone…), se greffe insidieusement, et ce depuis la première mouture du Loft au printemps 2001, une nouvelle proposition, voire imposition, dans la grammaire de Coca Channel 1 et de ses consoeurs et néanmoins amies : le simulacre généralisé. Si les aventures en apnée de Loana ou les tribulations variétoches de Jenifer from la Star Ac’ One ont savamment érigé l’image en vérité indiscutable (vous allez TOUT voir et en plus vous allez DECIDER du sort de ces rats de laboratoires, appelons un chat un chat), il est depuis la rentrée 2004 des métastases qui se répandent dangereusement dans les grilles des chaînes et, par rebond, dans les cerveaux disponibles, trop disponibles, des téléspectateurs qui n’en réclamaient pas tant mais qui, visiblement, en redemandent.

Ainsi, le nouveau monsieur déloyal du sport chez Coca Channel 1, Charles Villeneuve, est-il en train de confondre retransmission footeuse et reproduction de divers faits-divers. Sans doute a-t-il mal lu, voire pas lu du tout, la bible de Guy Debord. Pris la main dans le sac par Baudis du CSA (sac et CSA, tiens un amusant anagramme) en septembre dernier à propos d’une couverture plus que douteuse d’une disparition, en l’occurrence celle de Marjorie (qui ne connaîtra pas le sixième album d’Oasis, la pauvre), le Jean-Michel Larqué de Jean-Claude Narcy a écopé d’un penalty. Le droit de savoir, dit-il. À condition de respecter certaines lois. Et d’être en phase avec une déontologie certaine. Un séjour au pensionnat de Chavagnes ne serait pas superflu dans le cas présent. De la chaîne de Navarro à celle de Navarron, il n’y a qu’un pas endemolisé à faire. Petits arrangements avec les morts, et les proches de celui-ci, déjà malheureusement trop vus. Passons. Là où Villeneuve, champion toutes catégories de la désinvolture Formule 1, inquiète, oui inquiète, c’est lorsque, sous les tant rebattus oripeaux du devoir de mémoire, il lance ce que jamais Arthur et Courbit n’auraient jamais fourbi même dans leur cynisme le plus achevé - comment ça «La preuve par l’image » en 95, avec Annie Lemoine, qui truquait ses sujets ? Ah oui, j’oubliais. Vous avez dit devoir de mémoire ?

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Charles Villeneuve, qui est au journalisme ce que Harlem from la Star Ac’ Four est au rap, est donc en train d’accoucher, dans l’indifférence la plus totale, du cauchemar télégénique, et sociétal,  parfait : le docu-fiction. Le principe : reconstituer un événement historique (la sortie du Loft de Steevy, par exemple) avec des acteurs. Cela revient en quelque sorte à mélanger rock et électro. Ce que les Chemical, Norman Cook et Liam Lowette pratiquent  foutrement bien (exception faite du petit Liam qui avec son dernier disque déçoit un peu quand même). Mais là on parle d’art. Alors qu’en télévision, on aura beau illustré les exploits vocaux du petit Grégory (celui-ci, Laroche Joubert et Louvin vont pas tarder à le noyer sous la masse des prétendants à la célébrité de pacotille) d’un morceau pointu de Death in Vegas ou de …and you will knom us by the trade of death, ça n’y changera que dalle. Même sur Arte, l’art est incompatible avec le concept-même de syntaxe télévisuelle. Ce qui explique certainement le flagrant manque d’art dans les longs-métrages produits par les chaînes. Vous m’en direz tant ! Alors a fortiori lorsqu’il s’agit de mélanger incestueusement journalisme et fiction. Avec son monstrueux concept, dont la finalité effrayante n’est autre que de faire prendre des vessies pour des lanternes, le mensonge imagé pour une putain de réalité, M. Villeneuve alimente le mal qui ronge ce fichu monde. A savoir, l’image prise pour argent comptant. T’es fringué Levi’s, t’es riche. T’écoutes Radiohead, t’es intello. Rappelons juste au patron des sports de Coca Channel 1 et aux hérauts imberbes de la tolérance cette phrase si sage de Pierre Legendre, historien : « L’image ne garantit rien ». Deux solutions : suggérer au triste prince Charles de rester sage comme une image en commentant les avancées hésitantes du géant Moussa comme il l’a si bien fait en juin 98. Ou tout simplement : lui coller un carton rouge et une expulsion directe. Car, ici, l’analyse est à laisser au vestiaire.



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