Pour affirmer sa filiation
au burlesque, La Communidad se clôt sur une longue
séquence de poursuite sur les toits, où se
croisent des images de Monte La D’ssus (Avec Harold Lloyd)
et la Mort aux Trousses. La ruse et la capacité
de Julia à inventer des mensonges énormes dénotent
une naïveté presque enfantine face aux réalités
sordides du monde. En ce sens, elle n’est pas responsable de
ses actes, simplement innocente. De même les co-propriétaires
apparaissent comme des individus honnêtes, mais que la
frustration a transformé en tueurs potentiels. C’est
une société consumériste, prônant
la richesse comme valeur suprême ( " quelle
est la meilleure des drogues ? L’argent ! "
clame ainsi un spot publicitaire) et la satisfaction des envies
les plus irréfléchies qui poussent ces personnages
vers la sauvagerie. Le seul personnage qui a fait son deuil
de cette frustration est l’amant de Julia, Ricardo (Jesus Bonilla),
personnage furtif, offrant une alternative dans la résignation
à la lutte pour l’argent.
Quant à Julia,
elle est une créature de la société
du spectacle, à l’artificialité bouffonne, empruntant
aux héroïnes hitchockiennes leur chevelure oxygénée
et aux femmes d’Almodovar son tailleur d’un rose acidulée.
Tour à tour amante tendre, femme d’action et " au
bord de la crise de nerf ". Julia se caractérise
en fait par sa superficialité, son absence d’ancrage
dans le réel. Transformiste, elle se révèle
proche d’un autre personnage du film, avec qui elle s’enfuira
avec le magot : le jeune demeuré fan de Star
Wars, qui se promène dans l’immeuble accoutré
de pieds en cap en Darth Vader. Ces deux personnages sont
pour ainsi dire " sauvés ", car
ils assument le principe de la " vie par procuration "
imposé par la société consumériste
dans ses conséquences les plus carnavalesques. Les
citations ponctuelles de films américains, comme Star
Wars, Matrix et Seven s’intègrent dans l’esthétique
du kitsch que développe le film, rejoignant le thème
de la vie " par procuration ". Ainsi,
les superproductions hollywoodiennes se présentent
pour Alex de la Iglesia comme l'équivalent du " magot "
du vieux pour ses personnages : une sorte d’idéal
fantasmatique, qui ne peut s’intégrer dans la réalité
du film que par la dégradation de la parodie, vers
le grotesque.
Le mélange des tonalités,
malheureusement, ne prend guère. La volonté
de Iglesia de ménager ses personnages et de mettre
en lumière le reste d’humanité qui les motive,
introduit du pathétique dans la farce. Le caractère
schématique de ses personnages, justifié par
l’intention satirique, est ainsi brouillé par une invitation
à la compassion.
Titre : Mes
chers voisins Titre VO : La
Comunidad Réalisation :
Alex de la Inglesia Scénario :
Alex de la Inglesia, Jorge Guerrica Echeverria
Directeur de la photographie :
Kiko de la Rica Acteurs : Carmen
Maura, Eduardo Antuna, Maria Asquerino, Jesus
Bonilla, Fernandez Muro, Paca Gabaldon Musique :
Roque Banos Production : Andres
Vicente Gomez / LolaFilms Production : Lola
Films, Film Office Editions, Free Dolphin Distribution : Lolistar Sortie le : 03 juillet
2002 Durée : 1h 45
mn Pays : Espagne Année :
2000