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Minority Report (c) D.R.
Et si l’image de préméditation se trompait ? Si elle dévoilait à notre insu ? Au bout d’une heure, un second film est mis à nu : le film mental qui va permettre à John Anderton, l’espace d’un cillement, d’anticiper l’image le montrant comme un assassin. Au-delà de la lutte du soldat contre l’empire (dont il provient), lutte d’un homme en quête de rédemption (son fils a disparu) que l’on découvre sur un écran " coupable " d’homicide, Minority report reste le récit d’une solitude. Si dans A.I. (Artificial intelligence), dernier film de Spielberg, le petit robot apprend à évoluer parmi les vivants, John apprend à vivre avec les morts. Il est question ici d’un émouvant vacillement et de faiblesses humaines ; il est question de la froideur d’un cœur tangible, ce qui fonde notre rapport même aux images, aux fictions intérieures qui le régit. Comment l’image mentale (le deuil du fils) préexiste par le manque et comment le manque pénètre dans l’image visuelle résument clairement la plus émouvante et théorique des scènes du film : en faisant du home-cinéma high-tech de John, une projection mentale du souvenir (comme une plage mentale stockée en mémoire), Spielberg montre simplement le passage, l’incarnation du manque, d’une image mentale à son rendu visuel. Devant le flou-bougé de l’image, rendu photographique de cet " instant décisif ", John est en proie à une impuissance généralisée (gestuelle, affective), qui masque ses émotions tout en secrétant un manque en lui. Cet insondable manque est le cœur secret de Minority report : avant que l’on ne voie son fils, l’enfant incarne l’image manquante. Spielberg rejoint ainsi la réflexion sur l’image manquante de De Palma comme point mort, qui sera conditionnée par la quête d’une preuve par l’image, lorsque John découvre la photographie de son fils. Un leurre ou une manipulation de l’image qui bouclent habilement la similitude avec le cinéaste du (faux) montage.

Quelque chose de tristement onaniste transparaissait déjà des premiers plans : gymnastique technique et utilisation manuelle des écrans, revêtement de gants fétichistes, pyrotechnie rassurante et érotisée pour une chorégraphie déshumanisée. Ces gants, avec deux doigts lumineux qui chacun formatent le cadre, dessinent de splendides courbes (l’image inutile que l’on jette de côté) ; or, leur fonction redouble d’importance, par le biais des écrans, en faisant un lien, tel un rayon invisible, entre les fantaisies high-tech (le palpable) et une vision du monde déshumanisé (l’intouchable). Ce qui touche dans Minority report renvoie à tout ce qui est de l’ordre de l’exsangue. Ce qui advient de la nouvelle utilisation du corps-manga de Tom Cruise vivant dans le passé que l’on projette dans la ville futuriste. Ce qui forme la substance d’une esthétique aseptisée du chaos, société abstraite et hors-champ : les trajectoires urbaines d’un corps somnambule sans cesse en survie. Regard évidé (il va perdre la vue) puis décharné (chez Philip K. Dick, le trafic d’œil est roi) : John est un héros désincarné. Minority report excelle à montrer la naissance à rebours d’un surhomme démuni et impuissant, qui se traduit jusque dans son utilisation des écrans : langueur et vélocité, fléchage et segmentation de l’espace qui alternent tout en composant un mouvement vif et langoureux qui dilate l’espace-temps, dépasse l’arsenal technique jusqu’à la perte de sens. Ce qui est en jeu ne se mesure plus : passage de l’automate à l’humain, du froid au chaud (A.I), déshumanisation finale de l’homme et de la machine. Le monde/chaos s’y réduit à cela : une chute des murs d’images qui ouvre sur une vraie expérience de l’intime.



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Minority Report 
: Site officiel du film




Titre : Minority Report
Réalisateur : Steven Spielberg
Acteur : Tom Cruise, Colin Farell, Samantha Morton et Max Von Sydow
Scénario : Scott Franck et Jon Cohen
Basé sur la nouvelle de : Philip K. Dick
Directeur de la photographie : Janusz Kaminski
Chef monteur : Michael Kahn
Chef décorateur : Alex McDowell
Chef costumière : Deborah L. Scott
Superviseur des effets visuels : Scott Farrar
Musique : John Williams
Production : Twentieth Century Fox, Dreamworks Pictures.
Produit par : Gerald R. Molen, Bonnie Curtis, Walter F. Parkes, Jan De Bont
Sortie France : 2 octobre 2002
Durée : 2h25