SYNOPSIS :
Pour sauver la vie de sa sœur, dont l’état de santé
demande une greffe de rein urgente, un jeune homme sourd-muet
à vocation d’artiste, Ryu, décide - après
avoir perdu son travail et s’être fait voler un rein par
des trafiquants d’organes - d’enlever la fillette de son ex-patron
et d’exiger une rançon suffisante pour lui permettre
de remplir son devoir de frère. Mais la situation devient
incontrôlable lorsque l’enfant meurt par négligence.
Le père brisé n’a pas d’autre choix que de réclamer
vengeance, et l’hécatombe absurde se poursuit dans le
bon droit de chacun. |
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POINT DE VUE
Quel est le prix d’une vie ?
Question intéressante, auquel le western italien apporta
en son temps une réponse que l’on crut définitive :
rien, ou pas grand-chose. Mais dans le monde décrit
dans le film de Park Chan-Wook, si proche du notre, c’est
selon : les fluctuations boursières, ou celui
du marché d’organes… Toutes les atteintes à
la dignité humaine sont désormais possibles
à l’heure de la plus totale précarité :
l’annonce par téléphone de la mort d’un enfant
annoncé comme on confirme une commande, une séance
de masturbation collective au son des râles de douleur
d’une cancéreuse.
Sympathy for Mister Vengeance
n’a cependant pas grand-chose d’un film pamphlétaire,
et le raffinement de sa mise en scène ne se remarque
que pour se faire aussitôt oublié : Le nihilisme
goguenard dont il fait preuve nous fait remonter aux métaphores
transparentes de la jungle moderne qu’élabora tout
un cinéma d’exploitation aujourd’hui défunt,
des Poliziechetti italiens à la série
des Baby Cart, où l’inscription dans un genre
garantissait les impératifs économiques, tout
en justifiant une recherche effrénée de l’évasion
par la catharsis de la sauvagerie absolue. Plus proche de
nous, on peut évoquer le théâtre de marionnettes
hiératiques et misérables d’un Takeshi Kitano
première manière, les fantasmes sadiques des
frères Cohen… Mais laissons à d’autres plus
qualifié le soin de l’exégèse :
elle se révèle indispensable, pour ce film fourmillant
de citations et d’hommages. Un signe qui ne trompe pas sur
la pleine conscience de son cinéaste des antécédents
cinématographiques existants en matière de fantasmagorie
nihiliste.
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Transposant un sentiment
prégnant de confusion spatiale, à moins que
ce ne soit l’inverse, le récit avance par ellipses
successives, les évènements déboulant
sans crier gare comme autant de signaux de détresse
discontinus. Avec une lucidité moqueuse, Park Chan-Wook
donne à penser le flux informel d’information de son
récit comme l’image même de notre contemporain.
Les données objectives vont trop vite pour réaliser
une réaction émotionnelle, et tout comme les
personnages, le spectateur se voit plongé dans la confusion
de l’animal acculé. Tout dès lors devient danger,
chaque geste entraînant des conséquences imprévisibles :
un mail envoyé dans les premiers instants du film trouvera
sa résolution dans ces dernières minutes, une
inoffensive poignée de porte devient instrument mortel.
Adoptant pour conter son douloureux propos une " grande
forme " héritée des compositions monumentales
d’un Andreas Gurski, Sympathy For Mister Vengeance
déploie des parcours individuels qui se dessinent en
pointillé, toujours perdus dans une géographie
à ce point soumises à la raison de la rentabilité
économique qu’elle sépare irrémédiablement
les hommes.
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Titre : Sympathy For Mister Vengeance
Titre VO : Boksuneun
Naui Geot
Réalisateur :
Park Chan-Wook
Scénario : Park
Chan-Wook, Lee Jae-Sun, Lee Mu-Yeong, Lee Yong-Jong
Acteurs : Song Kang-Ho,
Shin Ha-Kyun, Bae Doo-Na
Photo : Kim Byeong-Il
Pays : Corée
du sud
Année :
2002
Durée : 2h09
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